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Blog: Crise Mondiale. En route pour le monde d'après...

Publié : 29/02/12, 11:41
par freddau
MH Caillol présidente du LEAP 2020 m'a demandé mon avis sur le livre de Franck Biancheri, "Crise Mondiale. En route pour le monde d'après".


Tout d'abord, il faut saluer la démarche prospective de Biancheri et du LEAP, qui se livrent à un exercice ardu, celui de prévoir un avenir différent de celui prévu par les projectionnistes officiels et courtisans, qui se contentent, de dire que rien ne change, pour ne froisser personne.

Je sais ce que c'est, et quand mes propres pronostics ne se réalisent pas, on me le fait souvent remarquer. J'en ai eu l'exemple avec la récente pointe électrique. J'avais prévu la panne. Mais je n'ai pas dit quand. Si ce n'est pas cette fois, ce sera la prochaine. Il n'importe. Pour beaucoup, il faut prévoir l'heure et la minute, sinon, on est des charlatans.



Les tendances lourdes ne sont pas pressées. Mais elles ne dévient jamais.




Il y a deux sortes de gouvernants. Ceux à qui on ne peut cacher la vérité, et ceux à qui on ne peut la dire.
Visiblement, nous avons atteint le deuxième stade.



Tout d'abord, le constat est clair est bien délimité. Nous vivons une période charnière, d'effondrement d'un monde ancien, et de gestation d'un monde nouveau.

Le monde occidental, dominant depuis trois siècles, perd sa domination. Moi j'aurais dit qu'il était dominant depuis 1500, date à laquelle il s'empare du commerce mondial.

Mais là où je différe mais alors là totalement de F. Biancheri, c'est dans l'appréciation du contenu de la crise.

Certes, il y a une crise de la dette occidentale, publique et privée, des "investissements" sans aucun sens, et il n'y aura pas de reprise.



Mais, pour moi, écrivant depuis longtemps sur la crise énergétique, la "mère de toutes les crises", c'est l'énergie, et sa raréfaction, l'envol de son prix, qui a servie de détonateur aux crises immobilières et de la dette, tout simplement en désolvabilisant les acquéreurs récents, loin de tout, et quand même obligé de faire le plein.

Là où je vois une carence importante dans l'analyse, c'est la non prise en compte de la question énergétique.
Et s'il y a un domaine où tout le monde ment, c'est bien celui-là. Tout va très bien, madame la marquise, parce que ce craignent tous les producteurS d'énergieS, c'est la réduction des consommations, qui fera passer d'une tendance "structurelle", à toujours plus d'énergie consommée, à une tendance "croupion", de reliquat.



La dislocation géopolitique est normale. Ce qui est cocasse, c'est que des gens aient pu croire encore une fois, au "reich de mille ans", après tant de "reich de mille ans" qui ont toujours et sempiternellement duré beaucoup moins, souvent quelques années.



Comme le PCUS, devenant insensiblement une coquille vide, les organes du monde actuel se vident de leur substance, jusqu'à ce que quelqu'un emporte chez lui l'écriteau "ONU", ou "OMC".



Le mérite de Biancheri, c'est de rappeler cette évidence.



L'économie réelle l'emporte sur l'économie financière, mais les dirigeants européens n'envisagent pas cette option. Ils préférent tuer l'économie réelle pour sauver le monopoly.

Un de leurs illustres prédécesseurs l'avait pourtant dit à son procès de 1945. P. Laval, l'homme de la Déflation Laval de 1935 affirmait la primauté de l'économie réelle sur la finance, et mettait en avant ses efforts pour sauver l'outil de production du transfert en Allemagne.



Bien entendu, je suis d'accord aussi sur la phase de dislocation géopolitique. l'empire américain se contracte, encore plus visiblement en 2012 qu'en 2010, date du livre. La Russie est très bien préparée à la suite, elle a déjà connu son effondrement s'en est remis, et son économie n'est pas loin du "100 % réel", totalement assise sur ses productions miniéres diverses. Ce qui avait fait son malheur en 1991, fait son bonheur depuis 2001.



La recomposition asiatique est en cours, j'en suis d'accord aussi. Mais je doute fortement du rôle de la Chine. Elle est, comme disait Braudel, prisonnière de ses options antérieures, notamment de son énorme population. Mais pas seulement.



Les acteurs s'autonomisent, et la triade dominante militairement (USA-GB-Israël), sombrent dans le ridicule du capitaine fracasse. Comme l'espagnol matamore de 1660, raillé autant qu'il avait été craint antérieurement, et dont la rapière n'attrapait plus que des toiles d'araignées.

C'est le sort des "empires universels".



Europe et France ont droit ensuite à l'analyse. La carence des élites françaises est éclatante, leur "provincialisme" délirant.

Hors de leur village, dont ils ne sortent jamais, ils ne connaissent rien. De vrais bouseux, avec un bouseux en chef, NS.



Là aussi, la dislocation des empires entrainent le recul des parlers utilisés. L'espagnol est devenu provincial après 1660, le français après 1815, il n'y a pas de raison que l'anglais échappe au phénomène. C'est avant tout une merveilleuse langue pour s'auto-intoxiquer. Racontez une connerie en Anglais, elle fera le tour du monde. ça n'en restera pas moins une connerie.




Mais, je ne partage pas la foi de F. Biancheri dans l'Europe, l'euro et ses institutions. Une URSS ne peut se réformer. Il faut qu'elle disparaisse. "TINA", il n'y a pas d'alternative. Le degré national n'est pas dépassé.
Il correspond au génie européen. C'est la division du continent qui a permis son bouillonnement et son progrès.
Bien sûr, de temps en temps, il y a la guerre. Mais cela, quelque soit la formule utilisée, elle reviendra, tôt ou tard. Et les politiques d'austérités raménent à la guerre.

Les allemands de 1933 gueulaient comme des veaux contre le traité de Versailles, en s'infligeant, de leur propre fait, bien pire.

Erasmus me donne un goût dans la bouche. Celui de "l'homo sovieticus", ou du surhomme nazi. En plus civilisé, c'est quand même le même moule. Certainement le même qui faisait déjà le citoyen romain.



Comme je le dit, là où je vois une carence totale chez Biancheri, c'est la donne énergétique.
Tout les énergéticiens mentent.
En France on avait 125 000 tonnes d'uranium à extraire. On en a tiré 25 000 et le zéro a été atteint.
Mondialement, le pic de l'uranium remonte à 1989.

Visiblement, le pic du pétrole a été atteint la dernière décennie.
Le pic du gaz suit de 5 années le pic du pétrole (et non trente ans).

Quand au charbon, à l'allure où il est tiré, il sera aussi, très vite épuisé. En 1840, la Grande Bretagne estimait qu'elle avait entre 700 et 800 ans d'exploitation. Comme on a accéléré la cadence, en 2012, il ne reste presque rien.



La mère de toutes les crises, l'énergie, n'est pas traité.

C'est cette crise qui transforme le transport aérien en "activité caritative" (Dixit le président de l'IATA : "Houurrra pour notre bienfaiteur !!!), le transport maritime en gouffre (et pan, encore un navire au fond de l'eau), le transport ferroviaire en concept, et le reste globalement en déficit.




C'est d'ailleurs ce qui rend aussi les efforts de l'OMC cocasses. A l'heure où les transports se survivent par habitude, promouvoir le commerce international reléve de la maladie mentale profonde.



Le BDI (Baltic dry index), est tellement bas que s'en est un sous marin, les compagnies aériennes tirent le rideau les unes après les autres, en espérant que le voisin crévera avant, histoire de se partager les dépouilles.

La remise en cause géopolitique est avant tout la remise en cause ENERGETIQUE du monde, dominé il y a peu par les occidentaux, d'abord, par le charbon et ensuite par le pétrole et ses dérivés.
Mais, à moins d'une percée fabuleuse dans ce domaine, le monde d'après, c'est la montée en puissance des économies d'énergie et du renouvelable, pas pour économiser la planète, mais parce que l'inflexion est aussi énergétique.



Bien sûr, s'il y avait des effondrements monstrueux, comme la fin total du transport aérien, l'effondrement interne des USA, on aurait, mécaniquement le sentiment qu'ailleurs continue le monde ancien, simplement parce que cela donnerait un peu de mou à la production pétrolière, très tendue.
Mais la transition est déjà là. Certains aéroports ne sont plus desservis, les navettes sont moins fréquentes, les USA et l'Europe réduisent leur consommation d'énergie, notamment pétrolière.



Mais, ce qui ne changera pas, c'est qu'avec environ 90 millions de barils/ jour produit, on a sans doute atteint le maximum, et qu'après le maximum vient le déclin, et son nouveau sport : la réduction des consommations, et son avatar : "je ferais mieux que mon voisin".



On ne peut pas imaginer un monde d'après, sans prendre cette donnée en paramètre.
Comme les nucléocrates français sont absolument allergiques a tout forme de remise en cause du nucléaire, même si, lui aussi, ce n'est plus qu'un reliquat d'un "monde d'avant", et qu'ailleurs, notamment en Norvége, au Danemark, en Suéde, et en Allemagne, il se met, très vite, en place.



Là aussi, le génie européen, qui veut qu'un choix soit une vérité en deçà des Pyrénées et une erreur au delà fait son oeuvre. A l'inverse des empires, il n'enferme pas dans des voies sans issues, mais sacralisées au sein d'empires unificateurs.



Mais bon, le mérite se situe dans le fait de prévoir des bouleversements, toujours déplaisants pour les puissants et leurs zélotes.

Et non, le XXI siècle ne sera pas américain, il ne sera d'ailleurs, vraisemblablement, que "la route qui descend", non seulement pour l'Europe, les USA, mais le monde.



Il sera d'ailleurs très intéressants de savoir combien de milliards de personnes on peut nourrir avec moins de pétrole, ou même simplement "un peu moins" de pétrole...

On a cassé du sucre sur le dos de Staline et notamment sur l'holodomor, mais personne n'a cherché à connaitre le responsable de la plus grande famine/disette de tous les temps, celle de 2008. C'était la faute à pas de chance ? Ou la faute au fonctionnement propre de la société ?

Publié : 29/02/12, 11:41
par freddau
Et ben au moins,

on connait un nouveau mot: holodomor...

Publié : 29/02/12, 12:19
par dedeleco
Le problème n'est pas l'énergie qui peut être obtenue avec d'autres combustibles que le pétrole, mais l'augmentation du CO2 qui peut être multiplié par 10 avec ce qui est en réserve sous terre, suite à 600 millions d'années de mise en réserve photosynthétique, comme cela s'est déjà passé il y a 56 millions d'années, spontanément, par dégagement du méthane des fonds des mers.
Alors les mers remonteront de 70m, à 2 à 4m par siècle, irrémédiable, en fondant tout l'antarctique, qui se couvrira de forêts; comme il y a 56 millions d'années entre autres exemples du passé.
Il y a 15000 ans une telle remontée de 120m s'est produite en fondant toute la calotte glacière du pôle Nord.

Paris sera sous les eaux comme la plupart des villes mondiales !!

Le problème n'est pas le pic de carburant, imaginaire, mais la montée des mers irrémédiable sur un millénaire et les océans acides avec très peu de vie !!

Il faut absolument passer à l'énergie solaire (1KW/m2 ) et au pétrole à partir des algues marines dans les déserts.