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Le solaire thermique, encore un luxe

Publié : 17/02/04, 10:26
par Dearcham
Le solaire thermique, encore un luxe mais plus tout à fait une utopie LE MONDE | 14.02.04 | 14h09

"Le solaire, cela pourrait remplacer le marbre dans l'entrée." Jamais à cours d'images, Alain Maugard, président du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), est persuadé que cette énergie renouvelable peut devenir un signe extérieur de richesse. Sans doute plus valorisant, pour celui qui l'exhibera, qu'une berline énergétivore.

"Nous sommes sortis de l'ère des pionniers", veut croire Michèle Pappalardo, présidente de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Les deux organismes, qui ont signé jeudi 5 février un nouvel accord pour renforcer leur coopération, inauguraient le même jour des laboratoires solaires sur le site du CSTB, à Sophia-Antipolis (université de Nice). L'énergie solaire thermique - celle qui produit de l'eau chaude, et non de l'électricité - ne serait-elle plus tout à fait une utopie ? Quiconque a laissé un tuyau d'arrosage au soleil une journée d'été connaît la température de l'eau qui sort du robinet. Mais, entre cette forme rustique de chauffage solaire thermique et la production fiable et économique d'eau chaude, il y a un pas que peu ont encore franchi.

Selon l'Ademe, le prix d'un chauffe-eau solaire, équipé de 4 m2 de capteurs et d'un ballon de 200 à 300 litres (trois ou quatre personnes), est compris entre 3 000 € et 5 000 €, pose incluse. Les aides et subventions peuvent couvrir jusqu'à 40 % de ce coût. Mais l'amortissement de l'installation ne doit pas être espéré avant une vingtaine d'années. L'achat d'un tel équipement est encore une question de conviction.

En France, le plan Soleil 2006 de l'Ademe a favorisé l'installation en métropole de quelque 86 400 m2 de capteurs entre 2000 et 2003. Selon le Livre blanc de l'énergie émanant du ministère de l'industrie, c'est un million de mètres carrés de capteurs qu'il faudra installer chaque année après 2010 si la France veut respecter une directive européenne imposant de parvenir à 21 % d'énergies renouvelables à cette échéance...

Fin 2002, l'Hexagone comptait 670 000 m2 de capteurs, alors que l'Allemagne - où les subventions sont élevées - en totalisait 4,7 millions, loin devant la Grèce (2,8 millions) et l'Autriche (2,5 millions), sur un total de 13 millions de mètres carrés en Europe.

L'Ademe propose des fiches explicatives et des évaluations du coût des installations et des économies d'énergie prévisibles pour inciter les particuliers à s'équiper. Il existe plusieurs types de chauffe-eau solaires en fonction des besoins du foyer ou de la collectivité et des modes de chauffage déjà existants.

Difficile de choisir, devant la profusion des modèles. Avec son laboratoire d'essais de Sophia-Antipolis, le CSTB espère fournir, d'ici deux ans, des évaluations similaires à celles qui accompagnent les appareils électroménagers et permettent d'estimer, sur une échelle de A à G, leurs mérites en matière de réduction de la consommation d'énergie. Testés pendant un an en continu, pour simuler un vieillissement de dix ans, les équipements sont soumis à rude épreuve - y compris des vents de 200 km/h.

"Il ne faut pas chercher l'exploit, mais des solutions robustes", commente Alain Maugard, qui rêve de bâtiments à énergie positive, capable de produire plus de calories et de frigories qu'il n'en consomme. Mais, prévient-il, "le logement ne peut être un terrain d'expérimentation, sauf à risquer de disqualifier pour longtemps une technologie". Ainsi des études ont-elles montré que le solaire thermique a parfois déçu, pour des questions d'entretien et de maintenance.

Tous les ingrédients semblent réunis pour un décollage de cette énergie : outre les incitations financières, les pouvoirs publics ont prévu une politique de certification des matériels et des installateurs : il y a presque autant de chauffagistes adhérents à la charte "Qualisol" (4177) qu'il y a eu de capteurs installés en 2003 (5 300) ! Jusqu'à EDF et GDF, qui, à l'approche de l'ouverture du marché de l'énergie, intègrent le solaire dans leurs offres pour les rendre plus attractives.

Hervé Morin


Le site de l'Ademe offre une information sur les chauffe-eau solaires et autres énergies renouvelables.
Numéro Vert : 0800-310-311.

Souffler le froid grâce au chaud

Au cours de la canicule de l'été 2003, les 250 m2 de bureaux du laboratoire du CSTB de Sophia-Antipolis étaient rafraîchis à l'énergie solaire. "Alors qu'il faisait 34 degrés dehors, nous tenions à 28 degrés à l'intérieur", indique Dominique Cacavelli, directeur du laboratoire. C'est le soleil, via une machine de conception japonaise à absorption au bromure de lithium-eau, et 63 m2 de capteurs sous vide, qui a permis cette performance : l'eau, chauffée entre 75 et 95 degrés, fournit de l'énergie qui permet de produire du froid (entre 7 et 12 degrés).

L'équipement est similaire à celui installé il y a plusieurs années dans une cave de Banyuls. Il représente un investissement de 150 000 €, un coût rédhibitoire compte tenu du niveau actuel de celui des énergies fossiles et de l'électricité. Mais cette technologie pourrait être une solution d'avenir pour permettre au réseau électrique d'encaisser plus facilement les pics de consommation électrique liés à la climatisation croissante des bâtiments, indique-t-on au CSTB.