Ahmed a écrit :D'abord, merci pour le "sophisme" dont tu me gratifies négligemment et qui t'évites de répondre sur le fond. Tu es cependant excusable puisque le concept de "rapport de force" n'entrant pas dans ta grille explicative, ma phrase ne pouvait dès lors avoir de signification.
D'abord n'en fais pas une affaire personnelle. Je ne "te" gratifie pas toi. Je qualifie l'un de tes propos. Je rappelle que ton affirmation était :
"
Supposer une difficulté du fait de multiples facteurs subjectifs n'est qu'une façon élégante de noyer le poisson sous une apparente objectivité".
C'est un sophisme et une insinuation. Supposer une difficulté du fait de multiples facteurs subjectifs n'est en aucun cas une façon de noyer le poisson (procès d'intention). C'est supposer une difficulté du fait de multiples facteurs subjectifs. Et il y en a. Il est évident que peser le pour ou le contre, par exemple d'exploiter le néodyme à Madagascar, nécessite d'évaluer l'impact sur l'environnement. Pour chacune des solutions envisagées, il ne sera pas le même, comme le coût, par exemple mine est à ciel ouvert ou pas. Cela nécessite aussi d'évaluer l'impact sur le niveau de vie des populations locales, peut-être positif et ça peut faire partie de la négo, et tout va se jouer avec des jugements établis selon des échelles de valeurs rarement partagées par les acteurs. Par exemple l'acceptation d'une certaine dégradation d'une chose pour l'obtention de l'avantage d'une autre, va dépendre de facteurs subjectifs, cela dépend des personnes.
Une évaluation objective du projet devient quasiment impossible quand elle est complexe et implique des personnes très différentes, qui n'ont pas les mêmes intérêts. Ton "le rapport avantages/inconvénients est facile à établir, ce qui aide bien à la décision finale", certainement pas. Evidemment, si tu nous parles seulement de la thèse des exploitants, oui "le rapport avantages/inconvénients est facile à établir". Si tu nous parles seulement de la thèse des écologistes, oui "le rapport avantages/inconvénients est facile à établir". Mais si tu nous parles d'une décision obtenue entre exploitants, écologistes, populations concernée, et pour l'intérêt général, non : le rapport avantages/inconvénients sera très difficile à établir. L'existence de critères rationnels qui permettrait une décision automatique une fois qu'on a rempli les paramètres de la grille, c'est une utopie. Seul un consensus peut avaliser une décision.
Tout comme je me doute que mes considérations sur l'économie seront invalidées ex ante, toujours pour une raison de grille explicative inadéquate.
Un instrument ne mesure que ce pour quoi il est conçu et le terme de "richesse" est rempli d'ambiguïtés.
Tout d'abord, il n'est nullement surprenant que la richesse (au sens le plus trivial du terme) augmente: jamais la quantité de marchandises n'a été aussi grande. Cela s'explique par la nécessité du marché de toujours produire plus de marchandises pour lutter contre un profit qui tend à diminuer de façon structurelle avec le prix unitaire (ce qui permet [de moins en moins] d'étendre la consommation).
Face aux phénomènes de saturation qui s'observent dans les pays du centre et qui conduisent à des stratégies dilatoires en vue d'éviter l'effondrement, la conquête des derniers espaces possibles dans les pays de la périphérie conduit à plusieurs conséquences. D'une part, un certain déplacement des zones de "prospérité" dirigé du centre vers la périphérie (d'où le ressentiment des "bobos" du centre), d'autre part une monétarisation de populations qui vivaient jusque là peu ou prou en dehors du système économique. Ces derniers sont passés du néant statistique au statut de "nouveaux pauvres", ce qui traduit une détérioration de leur condition; pour les autres, qui se constituent progressivement en une classe moyenne, c'est un grand progrès (au moins si on l'analyse selon les critères occidentaux). Évidemment, autant la croissance initiale a été grande dans ces pays (je pense surtout à la Chine) du fait de l'importation de techniques opérationnelles (mais devenues improductives en termes de richesses abstraites dans les pays d'origine), autant la saturation sera rapide et ces pays seront rattrapés par une histoire qu'ils ne comprennent pas, pas plus que ne la comprennent ceux qu'ils imitent.
La richesse matérielle est répandue à profusion sur le monde, sans vaincre la pauvreté, ce qui n'a rien de surprenant puisque ce n'est pas son but qui est seulement, au travers de ces marchandises, l'accumulation de richesse abstraite. Ce dernier point explique également deux choses: premièrement, que la croissance des inégalités de fortune n'est pas un accident qui pourrait éventuellement être pallier, mais fait partie intégrante du processus (créant de ce fait une pauvreté relative croissante, puisque l'écart de richesse mesure le rapport de force existant entre les catégories sociales) ; deuxièmement, que la création de richesses matérielles à des fins d'accumulation abstraite infinie et irrationnelle entraîne la destruction massive des richesses naturelles.
Mon propos ne concernait pas les théories économiques (si l'économie était une science, elle aurait un pouvoir de prédiction, or on ne l'a jamais vu annoncer un crach boursier). J'essaie de garder les pieds sur terre.
"La richesse matérielle est répandue à profusion sur le monde, sans vaincre la pauvreté" : qu'appelles-tu "vaincre la pauvreté" ? Qu'appelles-tu "pauvreté" ?
Sans définition quantifiée, ce genre d'affirmation est une tautologie car chacun va y aller de son ressenti. Mais la pauvreté est évaluée selon certains critères objectifs (j'ai donné assez de liens sur le sujet). Si ceux de l'ONU ne satisfont pas tout le monde, ils ont au moins le mérite d'avoir été définis, et l'évaluation indique une progression dans le bon sens. Ca devient un peu pénible de voir que le moindre aspect positif de quoique ce soit dans le monde, est aussitôt nié. J'en viens à me demander si le déni des points positifs n'a pas la même cause que la mise en exergue des points négatifs, utilisée par tous les contestataires pour vanter leurs recettes miracles ou pour justifier la destruction du système existant.