Anthropocéne ou capitalocène?

Débats philosophiques et de sociétés.
raymon
Grand Econologue
Grand Econologue
Messages : 901
Inscription : 03/12/07, 19:21
Localisation : vaucluse
x 9

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par raymon » 10/05/16, 13:18

Un peu plus haut (désolé du retard!), il a été question des tyrans antiques et de la démocratie athénienne. Au risque de me répéter quelque peu, la tyrannie antique n'était pas vraiment ce que l'on imagine le plus spontanément, sans prétendre évidemment à la démocratie, elle s'opposait à l'oligarchie en s'appuyant sur le peuple et à constitué un marchepied à des formes ultérieures plus démocratiques...
De même, l'exercice de la démocratie athénienne était, en pratique, réservé aux seuls oisifs et excluait la très grande majorité de la population (femmes, esclaves, artisans...), donc il ne faut pas trop nourrir d'illusions sur cette fameuse "démocratie".

Oui bien sur ce n'était pas ce que l'on attendrai aujourd’hui Chouard l'explique bien d'ailleurs la sélection des citoyens se ferait sur des critères du genre jurée d'assise notamment pour être sélectionné il ne fait pas avoir été condamné à certains type de crime et délit.Bien sur aussi des femmes et bien sur également les "esclaves".
Ce mode de démocratie a Athènes a duré 300 ans.
0 x
janic
Econologue expert
Econologue expert
Messages : 19224
Inscription : 29/10/10, 13:27
Localisation : bourgogne
x 3491

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par janic » 10/05/16, 15:48

Ahmed bonjour
Et en votant, il abandonne aussitôt cette parcelle de souveraineté qu'il rétrocède à son représentant (non celui pour qui il vote, mais celui qui est élu, parmi les seuls* susceptibles de l'être...
Tout à fait. Le vote (actuel pour le moins) est fait pour laisser l'illusion d'une démocratie réelle, à défaut de mieux
PS: et si j'ose cette reformulation qui me démange depuis le début Anthropobscéne ou capitalobscène? :?
0 x
« On fait la science avec des faits, comme on fait une maison avec des pierres: mais une accumulation de faits n'est pas plus une science qu'un tas de pierres n'est une maison » Henri Poincaré
raymon
Grand Econologue
Grand Econologue
Messages : 901
Inscription : 03/12/07, 19:21
Localisation : vaucluse
x 9

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par raymon » 10/05/16, 19:14

Oui notre système de démocratie représentative est obscène. Mais on le remplace par quoi?
0 x
Ahmed
Econologue expert
Econologue expert
Messages : 12298
Inscription : 25/02/08, 18:54
Localisation : Bourgogne
x 2963

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par Ahmed » 10/05/16, 20:13

Comme l'a dit très justement Sen-no-sen, la question des institutions est relativement secondaire tant qu'il existera un consensus, non sur la répartition de la valeur abstraite, mais sur la prééminence de celle-ci.
La faculté de dissiper un maximum d'énergie des classes les plus riches provoque un désir mimétique chez les moins bien lotis, et cette rivalité perçue par les plus riches justifie leur conviction par effet miroir: leur état est désirable, puisque ceux qui n'y ont pas accès l'envie. C'est un cercle vicieux dont il semble difficile de sortir et qui explique que c'est toujours la droite qui soit aux commandes (quand bien même, par un subterfuge, elle se targe d'être "socialiste").
Les électeurs de gauche réclament plus de justice sociale, quoiqu''une injustice qui leur profiterait ne serait pas pour leur déplaire; les électeurs de droite (je parle de ceux de la base), se projettent dans cette classe dirigeante dont ils estiment, par leur soutien, faire plus ou moins partie symboliquement, et peut-être, un jour, de façon plus substantielle. Dans ces deux camps, prospère la même illusion... l'idée de "justice" est incompatible avec celle de l'accumulation de la valeur abstraite "à tout prix".

Le jeu de mot sur "obscénité" est excellent, mais rapporter des notions morales à ces phénomènes tend à obscurcir l'analyse: il y a moins d'obscénité dans le capitalisme que d'aveuglement chez les agents de fonction du système.
0 x
"Ne croyez surtout pas ce que je vous dis."
Avatar de l’utilisateur
sen-no-sen
Econologue expert
Econologue expert
Messages : 6856
Inscription : 11/06/09, 13:08
Localisation : Haut Beaujolais.
x 749

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par sen-no-sen » 10/05/16, 21:25

Ahmed a écrit :l'idée de "justice" est incompatible avec celle de l'accumulation de la valeur abstraite "à tout prix".


Bonne remarque!
Les raisons sont simples et sont liés aux principes de la thermodynamique:l’énergie se conserve(1er principe de la thermo).
Ont peut donc imaginer une ligne imaginaire qui correspond à l'équilibre thermodynamique.
Tout emprunt d'un coté (accumulation de valeurs)entraine nécessairement une dépression de l'autre,comme ci dessous:
Image

Le principe de justice est à mettre avec cette notion "d'équilibre",représenté sur la schéma par la ligne droite(rendre la justice= rétablir l'équilibre,on parle d'ailleurs de "droit",droit du travail,droit de l'homme,"quelle personne droite" etc...c'est dire si la notion est claire!!!).
Hors dans une société ou la tendance est aux toujours plus,il est logique de constater une augmentation des injustices,cela est normal si je puis dire.
Attention toutefois! Ses injustices sont parfois très difficiles à discerner.
Ainsi ,et cela nous ramène presque à la métaphysique:toute accumulation de quelque chose entraine une dépression quelque part qui vient nuire à une autre...
C'est ainsi que la notion de "progrès",si cher à certain,doit être comprise au travers de ce concept:tout ce qui pris d'un coté se paie (souvent lourdement) de l'autre.
Tout développement humain entraine nécessairement un recul des autres formes de vies,et c'est exactement ainsi que se caractérise notre période anthropotechnique:une tempête dans les sinusoïdales!
0 x
"Le Génie consiste parfois à savoir quand s'arrêter" Charles De Gaulle.
Ahmed
Econologue expert
Econologue expert
Messages : 12298
Inscription : 25/02/08, 18:54
Localisation : Bourgogne
x 2963

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par Ahmed » 10/05/16, 22:11

Bien entendu, si l'accumulation ne portait que sur des valeurs d'usage (utilité), l'accumulation ne conduirait pas à plus d'injustice*: c'est ce qu'exprimerait l'argument rhétorique du "top down effect" (théorie du ruissellement), s'il n'était faux, puisqu'il s'applique à la seule valeur abstraite.
tout ce qui est pris d'un coté se paie (souvent lourdement) de l'autre.

Cela me rappelle une discussion (il y a longtemps!) avec Remundo, qui parlait de "création de richesse", à quoi je lui opposait une "destruction de richesse" consécutive et symétrique: évidemment, nous ne parlions pas de la même richesse et je jouais sciemment sur cette ambiguïté langagière.

*Il n'y aurait pas plus d'injustice directe, puisque les biens matériels seraient mieux partagés, mais surtout parce que les véritables besoins sont limités; certes, il existe le risque d'une extension de besoins "sociaux" résultant de la compétition mimétique, mais il est impossible de décrire précisément une réalité de laquelle la valeur abstraite serait évincée... J'ai tendance à penser que s'observerait une saturation, au delà de ce qui serait souhaitable, mais bien en deçà de ce qu'autorise la valeur abstraite et ses conséquences bien réelles sur la biosphère.
0 x
"Ne croyez surtout pas ce que je vous dis."
Avatar de l’utilisateur
Obamot
Econologue expert
Econologue expert
Messages : 28725
Inscription : 22/08/09, 22:38
Localisation : regio genevesis
x 5538

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par Obamot » 10/05/16, 22:54

Ahmed a écrit :Obamot, tu écris:
Et par le vote, il est implicite qu'il est détenteur d'une partie de la souveraineté politique: ce qui en fait est l'essence même de la démocratie, si ce n'est sa définition.

Et en votant, il abandonne aussitôt cette parcelle de souveraineté qu'il rétrocède à son représentant (non celui pour qui il vote, mais celui qui est élu, parmi les seuls* susceptibles de l'être...

*Et qui représentent la même politique, puisqu'ils ne sont adversaires qu'à titre nominal.

En effet, puisque c'est ce à quoi je me réfère en disant que la démocratie a été confisquée. Tu dis qu'elle l'est de fait. Préservant ainsi le risque majeur de remettre en question le processus anthropotechnique.

Tu dis ailleurs que tout ça serait au départ mimétique. C'est pourquoi pour en sortir il vaudrait bien renoncer CONSCIEMMENT aux contraintes qui nous conduisent à tenter de pérenniser ce que tu appelles le capitalocène? Qui devrait s'éteindre comme toute guerre, faute de "combattants" en l'occurrence on parle de l'épuisement d'autres "ressources naturelles" [...] qu'il est bien triste de laisser "réguler/dilapider" celles-ci tout seul par les "marchés" (via la loi de l'offre VS demande) et ainsi sceller à jamais le sort des joyaux de la planète....
0 x
raymon
Grand Econologue
Grand Econologue
Messages : 901
Inscription : 03/12/07, 19:21
Localisation : vaucluse
x 9

Re: Anthropocéne ou capitalocène?




par raymon » 11/05/16, 09:13

Et en votant, il abandonne aussitôt cette parcelle de souveraineté qu'il rétrocède à son représentant (non celui pour qui il vote, mais celui qui est élu, parmi les seuls* susceptibles de l'être...

Tu devrai dire en votant dans notre système d'élection .Les anarcho-syndicaliste ont une autre façon de voter (Oui ils votent aussi!) pour désigner un délégué. Un délégué est élu pour un mandat précis il ne doit pas outre passer son mandat et surtout il est révocable à tous moment.
Des délégués élus sur un mandat précis (et révocables à tout moment) ainsi que différents conseils de coordination et de gestion (avec des pouvoirs d’administration mais pas de décision) doivent suffire pour faire tourner une société moderne, si complexe soit-elle.

http://www.cnt-f.org/59-62/la-cnt-c-quoi/

Une autre méthode de prise de décision c'est le consensus système beaucoup plus complexe:
http://1libertaire.free.fr/SansTitreConsensus.html
0 x
Ahmed
Econologue expert
Econologue expert
Messages : 12298
Inscription : 25/02/08, 18:54
Localisation : Bourgogne
x 2963

Re: Anthropocéne ou capitalocéne?




par Ahmed » 11/05/16, 10:05

Affirmer que la démocratie est "confisquée" doit s'entendre d'un point de vue principiel et non historique, puisqu'elle n'a jamais eu d'existence historique. Certes, des peuples ont fonctionnés (et peut-être encore aujourd'hui) en appliquant ce principe, mais le concept de démocratie , lui, leur est totalement étranger, du fait même de sa réalisation effective.
C'est comme d'imaginer notre société respectant parfaitement l'écologie*: aussitôt, ce concept deviendrait inutile et désuet.

Difficile d'envisager de renoncer à la rivalité mimétique qui est corrélée à nos facultés d'apprentissage, mais elle peut s'exercer dans des domaines moins dévastateurs que l'économie...
Ce que tu appelles "besoin de contrainte", d'après Maslow, est probablement un des aspect essentiel de la rivalité mimétique: le désir pour l'objet détenu par le rival ne fonctionne que si le rival est hors d'atteinte, si ce n'était le cas, alors le désir s'évanouirait; il est donc nécessaire de survaloriser le rival (à tort ou à raison), à tel point que la rivalité mimétique puisse continuer à jouer son rôle.
Ce serait le danger d'une démocratie: plus les gens sont semblables, plus ils sont rivaux (bien qu'essayant d'apparaître alors comme d'autant plus différents).
Un bon exemple en est le conflit avec Daesh: quoi de plus différent que cette théocratie moyenâgeuse et nos sociétés modernes? Et pourtant, cette différentiation est largement mensongère, loin de constituer deux univers étanches prêtant le flanc à un jugement du genre "choc civilisationnel", l'analyse révèle tout autre chose. L'expansionnisme économique des sociétés modernes entraîne deux conséquences explosives à sa périphérie -1 le désir d'accéder à une forme de vie si séduisante, -2 le blocage de tout ce qui peut permettre d'espérer y parvenir**. La rivalité mimétique joue dès lors à plein, mais comme elle ne peut se permettre de se révéler comme telle, elle se dissimule derrière un refus véhément de ce qu'elle convoite (la modernité) et, tel un bernard-l'hermite, se réfugie opportunément dans la coquille vide d'un islamisme archaïque (comme elle pourrait le faire dans un marxisme simplifié, ou dans un nationalisme classique).
Cela fonctionne d'autant mieux que la rivalité mimétique est intimement liée à la violence et celle, individuelle, des terroristes enclenche des cycles où elle trouve à chaque fois de nouveaux aliments, puisque chaque camp interprète chaque fait suivant une analyse autojustificatrice, ainsi la défaite (provisoire) des uns est-elle la victoire des autres, selon les critères qui leur sont propres.

*Inutile de préciser qu'il s'agit d'une simple hypothèse d'école!
**Non seulement cela, mais aussi la destruction du tissu économique fonctionnel.
0 x
"Ne croyez surtout pas ce que je vous dis."
Avatar de l’utilisateur
Obamot
Econologue expert
Econologue expert
Messages : 28725
Inscription : 22/08/09, 22:38
Localisation : regio genevesis
x 5538

Re: Anthropocéne ou capitalocéne?




par Obamot » 11/05/16, 17:54

Ahmed a écrit :Affirmer que la démocratie est "confisquée" doit s'entendre d'un point de vue principiel et non historique, puisqu'elle n'a jamais eu d'existence historique. Certes, des peuples ont fonctionnés (et peut-être encore aujourd'hui) en appliquant ce principe, mais le concept de démocratie , lui, leur est totalement étranger, du fait même de sa réalisation effective.
C'est comme d'imaginer notre société respectant parfaitement l'écologie*: aussitôt, ce concept deviendrait inutile et désuet.

*Inutile de préciser qu'il s'agit d'une simple hypothèse d'école!

Ça... pour le moment (je te taquine un peu, pour ne pas voir la chose superficiellement, puisque tu raisonnes en profondeur!^^) la démocratie est faite avec des lois, qui, si on ne les respecte pas, font que le volet répressif entre en action: après on peut toujours dire que ça n'existe pas :D Ça dépend ce que tu appelles "réalisation effective" (si c'est de dire que dans le mode d'application, dès lors que ça ne correspond pas à tes/nos propres vues ce n'est pas "effectif", c'est un critère secondaire, puisque dans l'intervalle la loi s'applique => "Besoin de contrainte" revendiqué => revendiqué et exprimé par une loi => application de la mesure de contrainte => respect de la mesure de contrainte — en principe et en général par beaucoup — donc suivisme et asservissement à la loi, c'est le mimétisme de l'observation du potentiel coup de pied au train en cas de terrain de défi... assez efficace).

Ahmed a écrit :Difficile d'envisager de renoncer à la rivalité mimétique qui est corrélée à nos facultés d'apprentissage, mais elle peut s'exercer dans des domaines moins dévastateurs que l'économie...

Il n'y a pas de possibilité d'exprimer cette rivalité, si tant est qu'elle existe: dans le cas qui précède. C'est une sorte de nivellement.

Ahmed a écrit :Ce que tu appelles "besoin de contrainte", d'après Maslow, est probablement un des aspect essentiel de la rivalité mimétique: le désir pour l'objet détenu par le rival ne fonctionne que si le rival est hors d'atteinte, si ce n'était le cas, alors le désir s'évanouirait; il est donc nécessaire de survaloriser le rival (à tort ou à raison), à tel point que la rivalité mimétique puisse continuer à jouer son rôle.

Puisque tu me tends la perche* ( :mrgreen: ) je vais tenter une modeste réponse!

La "Pyramide des besoins" de Masslow, n'est pas une théorie visant à assoir tel ou tel paradigme fondé sur le consumérisme (et/ou qui validerait en quoi que ce soit le "bien fondé" du modèle théorique actuel, oh ça non...). Ce n'est qu'une tentative de hiérarchiser les besoins chez les individus — chose hautement subjective — précisément en tenant compte de cette subjectivité (Masslow affirme que chaque individu a sa propre pyramide des besoins et que relativement à ça, il serait "motivé par son besoin le plus bas insatisfait"). C'est plutôt un cliché des réflexes cognitivo-comportementaux d'un individu (ou d'un groupe réagissant de même manière) à un moment "T". Je n'y vois rien d'autre qu'un outil de compréhension de certains mécanismes mentaux. Il serait d'ailleurs intéressant d'étudier pourquoi ceux-ci peuvent devenir pathologiques à un moment donné (puisque tu fais référence à ce qu'il se passe au Moyen-Orient, qui n'est pas seulement Dae$h) ou a contrario donner des génies pourront éventuellement contribuer à guider l'humanité...

Dans cette pyramide, il est une catégorie des besoin qui est commune à TOUS les individus: les "Besoins physiologiques" (boire, manger, dormir, ne pas avoir froid ou trop chaud etc...) sans la satisfaction desquels rien n'est possible. Et on comprend tout de suite que le "Besoin de contraintes" est profondément ancré, puisqu'il en fait partie. Bien que je ne dénie pas qu'il puisse y avoir du mimétisme dans l'acquisition des réflexes y relatifs, ce qu'il est surtout intéressant de constater, c'est que ce besoin s'impose même dans les cas d'une conscience de soi relativement peu développée (on peut se droguer, ou nuire à sa santé de diverses manière, sans avoir renoncer à boire ou à manger... de la même manière, on peut consommer sans percevoir toutes les conséquences et implications de ses choix de consommation!)

Puis viennent les "Besoins de sécurité" (avoir un salaire, vivre en sécurité chez soi, pour s'y reposer lorsque l'on est le plus vulnérable, rouler dans les limitations de vitesse pour éviter de se tuer, etc), que l'on pourrait classifier également comme "indispensables" tout comme les "Besoins physiologiques", mais dont la particularité est que certains individus sont capable de faire fi des contraintes qu'ils représentent, pour prioritiser d'autres activités (du moins temporairement): un peintre en pleine pulsion créatrice qu'il en oublierait de manger (par exemple.) Ceux-ci arrivent donc même à reléguer des besoins essentiels (boire ou manger) pour se consacrer entièrement à leur préoccupation du moment.

Alors rivalité miémtique entre individus? Pas complètement puisque même en l'absence de rival, le/s besoin/s demeure/nt. Il faut monter dans les échelons de la hiérarchie de la pyramide ("Besoins sociaux, d'appartenance", et aussi "Besoins de développement") pour que le mimétisme dont tu parles s'exprime et s'applique (ce qui ne veut pas dire qu'il ne s'applique jamais à des échelons inférieurs, mais c'est pour dire que cela nécessite déjà une certaine conscience de soi et des autres, au moins en tant que référent). Le "Besoin de contraintes" est classifié en tant que "besoin" puisqu'il s'agit d'une revendication non formulée forcément consciemment par les individus, mais "besoins" qui restent impérieux dans beaucoup de cas. C'est pourquoi je dis (et en faisant référence à l'épistémologie constructiviste de Piaget et autres grands noms de l'observation de la motivation des individus dans une approche humaniste) que l'individu a besoin de développer sa capacité à "dépasser la conscience qu'il a de lui même" (déjà pour éviter qu'il en soit réduit à son niveau d'insignifiance potentiel...) mais c'est un besoin déjà très évolué. Il me semble que — par exemple — c'est là l'une des clefs de l'approche altruiste (comme celle d'être conscient des mimétismes et d'avoir la lucidité de voir lorsqu'ils s'expriment...) oui ça exige de toute évidence une sorte de renoncement de soi.

Ahmed a écrit :Ce serait le danger d'une démocratie: plus les gens sont semblables, plus ils sont rivaux (bien qu'essayant d'apparaître alors comme d'autant plus différents).

Tout dépend du degré de conscience de son "environnement" et notamment de la capacité de construction mentale dont on dispose. Mais si on observe les choses autour de soi: c'est vrai qu'il y a du boulot dans le domaine. Il faut voir le "Besoin de contraintes" à la fois comme une sécurité mais forcément également comme un frein...(et encore plein d'autres choses.)

Ahmed a écrit :Un bon exemple en est le conflit avec Daesh: quoi de plus différent que cette théocratie moyenâgeuse et nos sociétés modernes?
Même si il y a des pistes de réflexion, je ne connais pas suffisamment comment la C!A (je veux dire certains membres infiltrés, mais quand même à un très haut niveau) s'y est prise pour recruter les pseudo-futurs-djihadistes (comme aller jusqu'à leur donner des cours de pilotage pour ensuite aller se faire crasher dans les tours avec des avions détournés au mépris des vies civiles dans l'avion et au sol...ou comment s'y sont-ils pris pour développer des camps d'entrainement pour parvenir à leur fin: auto-détruire les rivaux de l'État hébreux en les faisant s'entre-tuer), grâce notamment aux théories de Gene Sharp ou aux expérimentations faite à Abou Ghraib ou à Guantanamo (par des sortes de Dr Mengele V2.0), mais il est certain qu'en fouillant bien, il doit y avoir un lien avec des "besoins" de type paradoxaux qui sont tellement antagonistes et enfouis, qu'ils peuvent amener les individus au bout d'eux-mêmes, jusqu'au sacrifice ultime de leur vie, et de facto au collapse de la pyramide qui justifierait le passage à l'acte... :shock: Ça dépasse l'entendement (d'un autre côté, c'est à double tranchant, si ça a fonctionné pour auto-détruire les individus avec autant de "facilité", ça pourrait tout aussi bien être utilisé pour "changer quelque chose dans la société" comme son modèle théorique avec les tares que l'on connaît...il y a l'exemple précurseur des flash-mob.)

Ahmed a écrit :Et pourtant, cette différentiation est largement mensongère, loin de constituer deux univers étanches prêtant le flanc à un jugement du genre "choc civilisationnel", l'analyse révèle tout autre chose.

Je mise sur le fait que la "greffe intergénérationnelle", n'a pas pris. Précisément parce que le "Besoin de contraintes" (architecte en partie d'une relativement "bonne" construction mentale) a fait défaut (par exemple: l'accès facile à internet a donné l'illusion d'un savoir disponible, mais....non acquis). Demande de contraintes revendiqués et qui n'ont pas été satisfaites, ce qui aurait dû permettre aux jeunes générations de se situer dans le monde (en leur donnant des repères qu'ils n'ont pas: absence du "père" au temps jadis, ou "vrai père" absent dans les familles recomposées, ou père tout simplement absent dans les cas de divorces, etc). Et comme ils n'ont pu être "satisfaits" ils se sont exprimés sous la forme que l'on sait: car pour un pseudo-djihadiste enrôlé, il y a peut-être 50'000 ou 100'000 individus qui se reconnaissent dans ce que tu appelles le réflexe mimétique (j'ai vu de nombreux cas où seulement 3 personnes déterminées avaient pu influencer tout un pays...). Ce n'est pas pour rien qu'un "besoin" s'appelle un besoin...Il y a là quelque chose de la "volonté personnelle" (exprimée consciemment ou pas), même si a un moment donné ça a dépassé la capacité de régulation par le juge de paix qu'est le "libre arbitre" (et cela n'empêche pas encore à un besoin d'être considéré comme tel, ni d'être passé à l'acte de sa satisfaction: "j'ai acheté une grosse bagnole 4x4 alors que je ne roule qu'en ville pour flatter mon égo" et c'est donc bien moi qui ait décidé que j'en avais "besoin" même si tel n'était pas le cas...à fond dans le mimétisme, peut-être...mais la représentation des besoins est riche et multiple.)

Ahmed a écrit :L'expansionnisme économique des sociétés modernes entraîne deux conséquences explosives à sa périphérie:

-1 le désir d'accéder à une forme de vie si séduisante,

-2 le blocage de tout ce qui peut permettre d'espérer y parvenir (non seulement cela, mais aussi la destruction du tissu économique fonctionnel).

La rivalité mimétique joue dès lors à plein, mais comme elle ne peut se permettre de se révéler comme telle, elle se dissimule derrière un refus véhément de ce qu'elle convoite (la modernité) et, tel un bernard-l'hermite, se réfugie opportunément dans la coquille vide d'un islamisme archaïque (comme elle pourrait le faire dans un marxisme simplifié, ou dans un nationalisme classique).
Cela fonctionne d'autant mieux que la rivalité mimétique est intimement liée à la violence et celle, individuelle, des terroristes enclenche des cycles où elle trouve à chaque fois de nouveaux aliments, puisque chaque camp interprète chaque fait suivant une analyse autojustificatrice, ainsi la défaite (provisoire) des uns est-elle la victoire des autres, selon les critères qui leur sont propres.

J'ai pas encore fait le tour de cette question (pour les motifs ci-avant) je te fais donc confiance... :wink:

*
► Afficher le texte
0 x

Revenir vers « Société et philosophie »

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 183 invités