La planète brûle et nous regardons nos smartphones.

Le réchauffement et les changements climatiques: cause, conséquences, analyses...Débat sur le CO2 et autres gaz à effet de serre.
Ahmed
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par Ahmed » 06/10/19, 13:04

Je suis en grande partie d'accord avec la première partie de ton message. L'analyse produite ensuite me semble bien plus contestable qui consiste à assimiler l'extractivisme global à une demande directe agrégée dont il ne tiendrait donc qu'à chaque consommateur de mettre fin (ou de la limiter).
En effet, le choix individuel ne peut s'exprimer que sous contrainte et, d'autre part, il n'est pas seul en cause.
Concrètement, pour en donner un exemple, l'usage d'une automobile peut s'expliquer par des choix urbanistiques qui éloignent les zones de travail et de résidence ou l'absence/insuffisances d'infrastructures de transport collectif (ou leur mauvaise adaptation).
D'autre part, les usagers n'interviennent pas directement dans la conception des produits et, s'il existe évidemment des cas de rejet, le choix ne peut généralement que s'exercer sur des produits largement analogues (du fait du mimétisme des politiques marketing ), donc sans qu'il exerce un poids discriminatoire. L'usager est également exclus par définition des processus de fabrication, ce qui inclus la partie technique et l'aspect social. Enfin, iI existe des secteurs entiers qui ne relèvent pas de son influence: tout ce qui a trait aux aspects militaires. C'est pourtant un secteur particulièrement problématique en terme d'intensité énergétique et de dégâts environnementaux (la capacité de nuire fait même partie intégrante des critères de classification!).
Croire qu'une démarche "citoyenne" d'abnégation serait à même de résoudre tous les problèmes actuels, y compris le déficit démocratique et les inégalités croissantes, c'est s'illusionner sur la nature des relations entre gouvernants et gouvernés.
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par sicetaitsimple » 06/10/19, 14:56

Ahmed a écrit : plus contestable qui consiste à assimiler l'extractivisme global à une demande directe agrégée dont il ne tiendrait donc qu'à chaque consommateur de mettre fin (ou de la limiter).


Comme souvent, je suis un peu "agacé" intellectuellement par ton approche "tout, sinon rien", malgré entre parenthèses le "la limiter".

Loin de moi l'idée de nier l'aspect structurel local( organisation de l'espace, logement, bagnole,....) et par ailleurs mondial( délocalisation de l'industrie, commerce international...) qui font que de toutes façons il n'est pas possible d'envisager des changements visibles rapidement dans leurs résultats au plan global.

En revanche, nier d'une certaine façon la capacité à agir au plan personnel par sa "consommation" au sens large ( que ce soit par un achat d'un véhicule "sobre", par le refus de bouffer des fruits venant de l'autre bout du monde, par l'arrêt de commandes de conneries inutiles sur Internet,par une réflexion sur la nécessité d'aller passer 10 jours sur une plage à l'autre bout du monde,...etc etc etc), je trouve ça un peu désolant.

Et si ça fait un peu boule de neige, je pense contrairement à toi que le système marchand s'adaptera à ces nouvelles demandes, y compris dans ses processus de fabrication si la demande est aussi de réduire l'extractivisme dans ceux-ci.

Bref, une démarche citoyenne qui n'est pas forcément de l'abnégation ne réglera pas tous les problèmes, mais elle peut à mon avis engager un cercle vertueux.

Sur le déficit démocratique et les inégalités croissantes, il y certainement des points d'accroche mais bon, je ne souhaite pas trop me lancer sur ce terrain, c'est généralement un dialogue de sourds. Je préfère rester sur l'extractivisme au sens un peu technique du sujet.
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par écologie réaliste » 06/10/19, 17:25

Ahmed a écrit : le choix individuel ne peut s'exprimer que sous contrainte et, d'autre part, il n'est pas seul en cause.

Les usagers interviennent directement par leurs votes.
Or, de quoi rêvent-ils, que réclament-ils à leurs gouvernements ? Ils réclament de la croissance, encore de la croissance, bref, de consommer encore plus ! Ils ne sont pas prêts non plus à partager un peu de leur abondance avec les plus démunis. La façon dont sont accueillis ceux qui réussissent à traverser la Méditerranée le confirme. La fameuse grille qui, dit-on, séparait les premières et troisièmes classes sur le Titanic existe encore ; cette grille aujourd'hui c'est la Méditerranée tout entière.

les usagers n'interviennent pas directement dans la conception des produits

Pas directement, mais indirectement par leurs achats qui ne sont pas guidés seulement par le marketing. S'il y a "mimétisme de marketing", c'est parce qu'il y a mimétisme de comportement des acheteurs. (On peut discuter longuement de l'oeuf et de la poule, du marketing et des choix...)

Je n'ai pas voulu dire qu'une démarche "citoyenne" d'abnégation serait la solution. Je pense qu'il faut d'abord prendre conscience que c'est nécessaire, au lieu de s'appuyer seulement sur les gouvernements ; d'autant plus que les gouvernements sont le reflet de ceux qui les élisent. Mais je ne crois pas réaliste d'espérer que cela se fasse vite, compte tenu de la nature humaine. Je sais que tu réfutes cette notion de nature humaine (un vieil échange) ; pourtant il existe évidemment un fond commun dans nos comportements, évidemment plus ou moins partagé, avec des variations selon les individus, et évidemment modulé par les cultures.
Dans ce fond commun il y a l'appétit au delà de la satiété, ce qui vaut pour la nourriture autant que pour les objets. Cela s'est vérifié partout de tout temps. J'en avais donné une description succincte dans cette page (le "gène du gavage") :
http://ecologie-illusion.fr/argent-ne-f ... onheur.htm

Cette notion a été largement développée et étayée par Sébastien Bohler dans son livre "Le bug humain" (Robert Laffont - Août 2019)
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par janic » 06/10/19, 17:47

d'autant plus que les gouvernements sont le reflet de ceux qui les élisent.
les élections de Chirac et notre président actuel en sont la démonstration inverse. Se défausser sur le moins pire pour en éviter un autre, ce n'est pas le reflet des électeurs, mais d'un système mis en défaut. 8)
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par Ahmed » 06/10/19, 20:56

Je te remercie, Sicétaitsimple, de ta réaction qui me permet de préciser mon message. Il n'était certes pas dans mes intentions de rejeter toute participation de chacun, mais de souligner d'une part, que le seul fait que quelques-uns fassent le choix, parfois très médiatisé, d'une extrême austérité en matière de consommation, que d'autre part bon nombre estiment que la limiter fortement serait de nature à résoudre les conséquences déplorées sont des attitudes qui ne mènent pas loin. Dans un cadre fonctionnel qui est le nôtre, cela ne jouerait (à condition de constituer un phénomène suffisamment massif) qu'à la marge et pas beaucoup plus que les périodes de dépression: diminution en volume seulement sur ce qui dépend de nous, mais persistance des structures et des logiques de production en place.
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par GuyGadebois » 06/10/19, 20:58

écologie réaliste a écrit :
Ahmed a écrit : le choix individuel ne peut s'exprimer que sous contrainte et, d'autre part, il n'est pas seul en cause.

Les usagers interviennent directement par leurs votes.
Or, de quoi rêvent-ils, que réclament-ils à leurs gouvernements ? Ils réclament de la croissance, encore de la croissance, bref, de consommer encore plus !

Une fois de plus, c'est du gros n'importe quoi!
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par sicetaitsimple » 06/10/19, 21:17

Ahmed a écrit :que d'autre part bon nombre estiment que la limiter fortement serait de nature à résoudre les conséquences déplorées sont des attitudes qui ne mènent pas loin.

Qu'en sais-tu? Pas beaucoup plus ou moins que moi je pense. Bien entendu et pour me répéter , on ne parle pas de résultats visibles demain matin.
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par sen-no-sen » 06/10/19, 21:41

L'inaction en matière écologique résulte essentiellement de l'enfermement et des capacités de saturation que génére le technologisme exponentiel.
Le système à permis de doper considérablement nos capacités de survie,et la société du confort qui en à résulté* nous à endoctriné dans un modèle de pensée anéantissant les formes concurrentes de développement .
A l'heure d'aujourd'hui et malgré une prise de conscience de la problématique écologique c'est l'architecture du système plus que sont idéologie qui rendent désormais peu réalisable les actes d'émancipations à sont égard.
En effet on peut être informé des risques causés par RCA ou de la baisse de la biodiversité, cela ne change en rien à la dure réalité quotidienne du monde.
Une grande partie de la population est tout simplement prisonnière des infrastructures en place:automobile omniprésente,grande distribution,dettes etc....
Nous sommes donc face à deux aspects:d'une part une quasi impossibilité des citoyens à s'émanciper d'un système fondé sur le mimétisme et la course en avant,d’où le recours à l’état providence et aux politiciens comme faiseurs de miracles à notre place(marche pour le climat).
De l'autre des politiciens qui s'en remettent à la "société civile" comme moteur de la transformation.Bref tout le monde se renvoi la balle.Si à cela on rajoute l'incompétence de nos dirigeants et le j'men foutisme générale ,cela n'augure rien de bon pour la suite.

Ce sont donc les déterminismes qui choisiront à notre place et cela ce fait déjà sentir...


*De façon très inégale cela va sans dire.
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par Ahmed » 06/10/19, 21:42

écolo, tu écris:
Les usagers interviennent directement par leurs votes.
Or, de quoi rêvent-ils, que réclament-ils à leurs gouvernements ? Ils réclament de la croissance, encore de la croissance, bref, de consommer encore plus !

Je ne pense pas que l'on puisse sérieusement avancer qu'il y aurait des candidats à l'élection qui représenteraient des options soucieuses de limiter l'intensité des échanges marchands: le fonctionnement de l’État en dépendant directement!
Si la notion de niveau de vie est si prégnante, c'est qu'après les violents conflits sociaux du XIX siècle et une partie du suivant, une sorte de consensus s'est établi ensuite progressivement sur l'équilibre entre capital et travail; les "trente glorieuses" consacrèrent ensuite l'idée d'une certaine égalité de répartition de l'extraordinaire production industrielle (égalité à usage interne, car reposant sur l'exploitation des pays périphériques). L'inversion des rapports de force entre ces deux pôles en faveur du capital au tournant des années 70 rendit caduque cet équilibre précaire et borne désormais l'horizon politique de la gauche à un retour (d'ailleurs parfaitement illusoire) à cette situation antérieure plutôt qu'à plus d'une croissance de moins en moins crédible. Il va de soit que cette période révolue a beaucoup marqué les esprits et qu'une grande partie de la population peine à imaginer un autre fonctionnement que celui qu'elle a connu ou entendu célébrer.

Plus loin:
Pas directement, mais indirectement par leurs achats qui ne sont pas guidés seulement par le marketing. S'il y a "mimétisme de marketing", c'est parce qu'il y a mimétisme de comportement des acheteurs. (On peut discuter longuement de l’œuf et de la poule, du marketing et des choix...)

La publicité joue un grand rôle, sinon comment expliquer son importance dans l'économie? Dans le processus qui va de la production-commercialisation à la consommation-destruction, le premier administré, le second par nature incontrôlé, la publicité sert précisément à l'ajustement du second au premier. Le mimétisme est une donnée constitutive des animaux sociaux. Sans publicité, pas de société de consommation, seulement quelques pathologies individuelles qu'il s'agissait de généraliser.

Plus loin:
...d'autant plus que les gouvernements sont le reflet de ceux qui les élisent.

Au niveau sociologique, c'est loin d'être le cas! :lol: D'un autre point de vue, peut-on soutenir sans rire que les gouvernements actuels représentent correctement l'ensemble des intérêts de leurs électeurs (au prorata des catégories présentes)?
L'état-providence qui a représenté cet équilibre entre capital et travail a disparu et transfert autant que possible ses anciennes compétences aux sociétés privées, en espérant que le marché fera le job! D'où les actuels mouvements sociaux et le raidissement des autorités qui entérinent la prédominance du capital et imposent la paix social, non par la concession, mais par la répression.

Enfin:
Mais je ne crois pas réaliste d'espérer que cela se fasse vite, compte tenu de la nature humaine. Je sais que tu réfutes cette notion de nature humaine...

Je suis d'accord sur cette difficulté, non en vertu d'une "nature humaine" qui ne représente qu'une facilité trompeuse de l'intellect, mais parce qu'un intense conditionnement à fait de l'homme "moderne" ce qu'il est (Cf Edward Bernays).
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Re: La planète brûle et nous regardons nos smartphones.




par être chafoin » 06/10/19, 23:11

Si la masse descendait de la Grande Roue de la fête perpétuelle de la consommation, le capitalisme s'effondrerait en quelques heures.
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