COVID-19 : pourquoi autant de clusters dans les abattoirs ?


  • Fanny Le Brun
  • Actualités Médicales
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D’importants foyers de COVID-19 ont été détectés dans des abattoirs industriels, en France mais également dans de nombreux pays comme l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Irlande, l’Australie, le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada et le Brésil. Le plus gros abattoir de porcs d’Europe, situé en Allemagne, n’y a pas échappé et a nécessité un reconfinement local fin juin après la détection de 1.500 personnes infectées par le SARS-CoV-2 sur les 6.139 employés de l’établissement.

D’où vient cette particularité des abattoirs ?

Il faut tout d’abord noter que l’origine de la contamination est humaine et ne concerne pas les animaux abattus (voir article univadis « COVID-19 : les animaux d’élevage représentent-ils un risque pour l’Homme ? »). Les abattoirs sont des lieux propices à la transmission du SARS-CoV-2 pour plusieurs raisons liées aux conditions de travail mais aussi aux caractéristiques socio-économiques des employés.

Concernant les conditions de travail :

  • Le port permanent du masque est difficile dans les abattoirs car les employés travaillent souvent dans des espaces clos où le niveau sonore impose de se rapprocher et de hausser le ton pour échanger entre collègues, ce qui favorise la transmission virale par gouttelettes de salive.
  • L’atmosphère des locaux d’abattage et de découpe est froide et humide, avec peu de lumière naturelle. Lorsque les températures de travail sont basses, la vapeur d’eau dégagée par la respiration des salariés entraîne une condensation rapide et une humidification des masques qui nuit à leur capacité de filtration.  
  • La survie et la propagation du virus sont favorisées par les systèmes de ventilation et de nettoyage par eau pressurisée.
  • Les conditions de promiscuité rendent difficile le respect d’une distanciation physique, aussi bien dans les vestiaires que sur la chaîne de travail ou lors des pauses.

Concernant les facteurs socio-économiques :

  • Les grands abattoirs embauchent souvent des étrangers recrutés en sous-traitance et des personnes vivant dans des conditions précaires avec une promiscuité qui augmente les risques de contagion (hébergements collectifs avec forte densité humaine, logements précaires de familles nombreuses).
  • Les moyens de déplacement de ces salariés (bus, covoiturage) favorisent la diffusion du virus, à l’intérieur comme à l’extérieur des établissements.
  • La diversité des langues et des cultures complique la mise en œuvre des mesures de biosécurité.

Une cible majeure pour la prévention

Face au constat de la forte implication des abattoirs dans la transmission du SARS-CoV-2, l’Académie nationale de médecine et l’Académie vétérinaire de France recommandent de renforcer :

  • La surveillance médicale du personnel des abattoirs, notamment en l’intégrant dans un programme national de dépistage du COVID-19.
  • Le contrôle des conditions de travail et du respect des mesures de prévention, en vérifiant notamment les équipements de protection individuels, les moyens de distanciation physique et les conditions d’hébergement collectif des personnels en contrat précaire.
  • Le contrôle par les services vétérinaires des règles d’hygiène s’appliquant au personnel, aux locaux, aux matériels et aux manipulations.