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Santé

Maladie de Lyme : le document qui montre le lien entre les experts et le laboratoire BioMérieux

Des patient atteints de la maladie de Lyme ont décidé de porter plainte au pénal contre l'Etat. Au cœur de cette affaire, des soupçons de conflits d'intérêt des experts du CNR qui collaboreraient avec les laboratoires pharmaceutiques fabriquant les tests de dépistage de la maladie de Lyme. 

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Les petites bêtes les plus dangeureuses pour l'homme

La tique transmet les bactéries du genre Borrelia responsables de la maladie de Lyme.

© BLANCHOT Philippe / hemis.fr / AFP

INFLUENCE. La polémique autour de la maladie de Lyme n’en finit plus d’enfler. Après la tribune d'Alain Trautman sur le site de Sciences et Avenir, ce sont cette fois les patients qui passent à l'attaque. Environ 300 personnes vont déposer une plainte au pénal début janvier contre Marisol Touraine (ancienne ministre de la Santé), Agnès Buzyn (actuelle ministre de la Santé), l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et le Centre national de Référence des Borrelia (CNR), les Borrelia étant les bactéries responsables de la maladie de Lyme. "Il s'agit d'une plainte pour violation du principe d’indépendance des experts, conflit d’intérêt, abus de biens sociaux, recel d’abus de biens sociaux, trafic d’influence, mise en danger d’autrui." explique Julien Fouray, l'avocat qui avec sa collègue Catherine Faivre mène cette offensive. A travers cette action en justice, ce collectif de malades vise à faire reconnaître le caractère chronique de la maladie et surtout s’attaque une nouvelle fois au test Elisa, test de dépistage qu’ils jugent inefficaces alors qu’il est indiqué en première intention. Ainsi, des dizaines de milliers de malades seraient déclarés négatifs lors de ces tests alors qu’ils souffrent de symptômes qui pourraient être liés à une infection par des Borrelia.

Mais l’action vise aussi indirectement le Pr Benoît Jaulhac, le directeur du CNR des Borrelia qui se trouve au coeur de cette polémique depuis plusieurs années. Il est effectivement le pourfendeur de l’existence d’une forme chronique de la maladie de Lyme. Mais surtout il défend avec vigueur la fiabilité des tests Elisa pour le dépistage. Il participe aussi actuellement aux réunions qui se tiennent à la Haute Autorité de Santé (HAS) pour la mise au point d’un protocole national de diagnostic et de soins (PNDS) de la maladie de Lyme. Ce PNDS qui devrait être connu en début d’année 2018, vise donc à revoir complètement le dépistage et le traitement de la maladie. Dans la définition de ce nouveau protocole, le Pr Benoît Jaulhac, en tant que directeur du CNR des Borrelia, a donc un poids considérable.

LABORATOIRE. Or, les malades mettent en doute son indépendance. Ils lui reprochent des liens étroits avec le laboratoire pharmaceutique BioMérieux qui commercialise la machine Vidas utilisée justement pour les tests Elisa dans le dépistage de la maladie de Lyme. Et effectivement, nous avons pu retrouver sur le site de BioMérieux, une plaquette “pédagogique” de 33 pages intitulée : “La borréliose de Lyme : du diagnostic à la prise en charge de la maladie” rédigée par le Pr Benoît Jaulhac, et quatre autres médecins, tous étant, comme l’indique clairement le document, affiliés au CNR des Borrelia. Mieux, nous avons aussi retrouvé la même plaquette “pédagogique”, mais cette fois en anglais, toujours signée par le Pr Benoît Jaulhac et ses collègues du CNR. Petite particularité de la version anglaise : elle est accompagnée d’une page de publicité pour la fameuse machine Vidas de BioMérieux utilisée pour le dépistage.

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DEPISTAGE. La justice devra donc examiner ces possibles conflits d’intérêt entre le CNR des Borrelia et les laboratoires qui produisent les tests contestés par les malades. Et ce alors que ces conflits d’intérêt auraient dû être déclarés à la Haute autorité de santé pour la mise au point du nouveau protocole de diagnostic et de soins (PNDS). Nous n’avons pas pu vérifier si cette déclaration avait bien été faite par le Pr Benoît Jaulhac. Par contre, nous avons pu constater que ses liens avec l’industrie pharmaceutique et notamment avec BioMérieux étaient déjà attestés dans sa déclaration sur la base de données publique Transparence - Santé du ministère de la santé. Mais les montants indiqués ne correspondent qu’à des défraiements (transport, repas, hébergement etc…). Rien à propos de la rédaction d’une plaquette de plus de trente pages pour le laboratoire. Le Pr Benoît Jaulhac a-t-il été rémunéré pour ce travail ? Savait-il que son nom serait associé à une publicité du laboratoire BioMérieux ? Peut-il être à la fois expert auprès de la HAS pour définir les nouveaux protocoles de diagnostic et de traitements de la maladie de Lyme et collaborer si étroitement avec un laboratoire qui justement produit des tests de dépistage ? Nous avons contacté le Pr Benoît Jaulhac par téléphone et par email pour l’interroger sur ces différents points. En déplacement à l’étranger selon son secrétariat, il n’a malheureusement pas pu nous répondre. Mais il n'est pas le seul visé par cette plainte. Selon nos informations, d'autres experts et d'autres laboratoires qui fabriquent ces tests seraient également mis en cause dans cette affaire.

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