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Nature & environnement

32 ans après Tchernobyl, l'essor du tourisme nucléaire en Ukraine

Le tourisme nucléaire en Ukraine connaît un succès de plus en plus important : en 2017, le site de Tchernobyl a attiré quelques 50.000 visiteurs. L'accident nucléaire est survenu il y a 32 ans, le 26 avril 1986.

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Un touriste prend des photos dans une école maternelle abandonnée dans le village de Kopachi près de la centrale de Tchernobyl le 23 avril 2018

En 2017, le tourisme à Tchernobyl a connu une hausse de 35% par rapport à 2016 et de 350% par rapport à 2012.

AFP - Sergei SUPINSKY

Le site de Tchernobyl est celui du pire accident nucléaire de l'Histoire. Il est aussi devenu, ces dernières années, une attraction touristique. Des visiteurs du monde entier affluent désormais dans cette ville d'Ukraine pour contempler les stigmates de la catastrophe. Les chiffres sont en constante croissance. Ainsi, l'an dernier, en 2017, quelque 50.000 personnes (dont 70% d'étrangers) se sont rendues à Tchernobyl, soit une hausse de 35% par rapport à 2016... et de 350% par rapport à 2012 ! On trouve même, à l'entrée principale de la zone d'exclusion, un kiosque de souvenirs offrant des t-shirts décorés de symboles de radioactivité noire et jaune et des masques à gaz soviétiques en caoutchouc kaki.

"J'en avais marre des Ikea, Mango, Zara... Je voulais voir quelque chose de totalement différent, comme Tchernobyl"

Maja Bandic, une Croate quinquagénaire, est venue spécifiquement dans ce pays pour visiter cette centrale tristement célèbre dont le 4e réacteur explosa le 26 avril 1986 contaminant une grande partie de l'Europe. "J'en avais marre des musées et bâtiments, de la globalisation. Chaque ville commence à se ressembler, on y voit des Ikea, Mango, Zara... Je voulais voir quelque chose de totalement différent, comme Tchernobyl", explique-t-elle à l'AFP, au milieu de la zone d'exclusion contaminée et toujours inhabitée, qui entoure la centrale dans un rayon de 30 kilomètres.

Certaines personnes on même fait de cette nouvelle attraction un business. Viktor Khartchenko est gérant de l'agence de tourisme Go2chernobyl.com. Il organise depuis 2012 des voyages vers ce site. Pour lui, ce boum touristique s'explique par deux facteurs clé : le 30e anniversaire de la catastrophe en 2016 et l'installation la même année d'un nouveau dôme de confinement métallique au-dessus du réacteur accidenté, qui a permis de réduire fortement les fuites de matières radioactives. Ces deux évènements ont été largement couverts par les médias internationaux.

"Cela a sans doute apaisé les craintes de ceux qui hésitaient à se rendre à Tchernobyl", estime Viktor Khartchenko. Il assure que ces voyages ne représentent aucun danger. "Une journée de séjour dans la zone équivaut à deux heures de vol au-dessus de l'Océan atlantique en terme de dose de radiation absorbée", affirme le gérant de Go2chernobyl.com. Pourtant, certains touristes avouent craindre encore des radiations. Joel Alvaretto, un étudiant argentin, assure avoir "un peu peur des radiations. On dit qu'on peut voir les effets des radiations beaucoup d'années plus tard, mais je ne sais pas". Mais en quittant Tchernobyl, tout le monde est obligé de passer des contrôles de radiation.

La reconquête par la nature de ces terres abandonnées fascine les visiteurs

L'agence de Viktor Khartchenko n'est pas la seule à proposer une excursion à Tchernobyl. Ainsi, plusieurs agences de voyages ukrainiennes offrent des séjours dans la ville d'une durée d'un à sept jours, et dont le prix varient entre 25 et 650 euros. Au programme : visite de la nouvelle chape recouvrant le réacteur accidenté, de villages abandonnés, alimentation de gigantesques silures vivant dans les eaux radioactives d'un canal de refroidissement... Dans certains endroits, de petits dosimètres portables de visiteurs se mettent à biper en désordre signalant les taux de radiations élevés. "Une vraie symphonie !", ironise un touriste.

Le point d'orgue de la visite est Pripiat, ville-fantôme située à seulement quelque kilomètres de la centrale et dont presque 50.000 habitants avaient été évacués en trois heures le 27 avril 1986 pour ne plus jamais revenir chez eux. On peut y voir des immeubles résidentiels abandonnés, des écoles où des jouets d'enfants, livres ou notes manuscrites traînent encore, un parc d'attractions dont la grande roue s'élève toujours sur la place centrale. "C'est très cool de voir tout cela, de voir comment toute une ville n'est désormais qu'un vestige de ce qu'elle était jadis", confie Adam Ridemar, un étudiant suédois venu avec son père voir ce "lieu culte". Il s'étonne de la végétation exubérante. "Je m'attendais plutôt à trouver de la jungle de béton ici", confie t-il. La reconquête par la nature de ces terres abandonnées, où des routes asphaltées se rétrécissent, mangées petit à petit par des herbes folles et des maisons disparaissent derrière la broussaille de plus en plus dense, fascine beaucoup de visiteurs. "Cela prouve que la nature après tout est plus forte que les humains. Et c'est très bien. C'est la puissance de Dieu, résume Mme Bandic. Les gens jouent avec des choses dangereuses : ils ont le soleil, le vent et n'ont pas besoin de l'énergie nucléaire, trop dangereuse".

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