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Pourquoi ne pas taxer le kérosène des avions?

Le carburant pour aéronefs est exonéré de taxes pour les vols internationaux, suite à une convention datant de 1944. Rien n'empêcherait pourtant de le fiscaliser pour les vols internes.
par Luc Peillon
publié le 6 novembre 2018 à 7h24

Question posée par Helena le 01/11/2018

Plusieurs lecteurs nous ont posé la question de la de taxation du kérosène, qui constitue notamment une revendication de la France Insoumise. Alors que les automobilistes viennent d’encaisser une hausse des prix à la pompe, en partie liée à la hausse de la fiscalité, que la SNCF s’acquitte de taxes sur l’électricité, les compagnies aériennes, elles, profitent d’une vraie niche fiscale: aucune taxe sur le kérosène ni de TVA sur les billets internationaux. Le transport aérien est pourtant l’un des modes de transport les plus polluants par kilomètre parcouru. Et si ce secteur ne représente, pour l’heure, que 2 à 3% des émissions mondiales de carbone, sa part devrait suivre la forte expansion attendue du trafic aérien.

Depuis la convention internationale de Chicago de 1944 sur l'aviation civile internationale, ratifiée par la France, les vols internationaux sont ainsi exonérés de toute taxe sur les carburants. L'objectif, à l'époque, était de développer le trafic international. Ils ne subissent ni TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques), ni TVA. Un manque à gagner estimé, pour la seule TICPE, à plus de 3 milliards d'euros pour les caisses de l'Etat en 2018, selon un rapport annexé au projet de loi de Finances 2018.

Pour les vols intérieurs, aucune taxation non plus. Et ce, alors même que rien ne l'interdit, comme le font déjà les Etats-Unis, le Brésil, le Japon, la Norvège, la Suisse ou encore les Pays-Bas. Un régime dérogatoire représentant quelque 500 millions d'euros de pertes annuelles pour les finances publiques, selon un rapport du RAC (réseau action climat). Une TVA de 10% sur les billets d'avion est en revanche appliquée (comme pour les autres modes de transport).

À plusieurs reprises, des amendements parlementaires ont tenté de mettre fin à ces niches fiscales pour les vols intérieurs. Sans succès. Avec notamment comme argument la préservation de la compétitivité des compagnies françaises, face à des entreprises étrangères qui iraient faire le plein hors de nos frontières. Au niveau international, la taxation de ce carburant supposerait la renégociation de ces accords. «Les pays européens ont proposé, à plusieurs reprises, cette solution lors des assemblées générales de l'OACI [organisation de l'aviation civile internationale, ndlr], mais ils n'ont jamais pu obtenir un consensus», rappelle la Cour des Comptes.

Le transport aérien n'est cependant pas exempt de taxes. Il en existe de différentes sortes (aéroport, aviation civile, solidarité, nuisances sonores, sécurité...) dont le montant varie en fonction de l'aéroport ou encore de la classe choisie, et qui peuvent représenter une part conséquente du billet initial. Selon un la cour des comptes, les compagnies estiment même «que l'avion est le seul mode de transport à financer intégralement le coût de ses infrastructures par des taxes et redevances, et même des tâches régaliennes – en théorie du ressort de l'impôt – comme les contrôles de sûreté aéroportuaire». Pas totalement vrai: les aéroports régionaux, par exemple, bénéficient bien de subventions des collectivités locales.

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