Didier Raoult lors d'une conférence de presse le 27 août 2020 à Marseille

Les accusations s'accumulent contre le professeur Didier Raoult, accusé notamment de faux témoignage devant la commission d'enquête sur le Covid-19.

afp.com/Christophe SIMON

Qu'ils pratiquent encore ou qu'ils soient à la retraite, le Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom) a décidé de sévir contre les médecins dont les propos sur la pandémie de coronavirus sont jugés controversés. Six praticiens, dont les professeurs Didier Raoult et Christian Perronne se retrouvent visés par une plainte de l'organisme.

Publicité

L'instance a examiné début décembre une série de plaintes ou de signalements visant des médecins, pour des faits ou propos tenus publiquement sur la pandémie de coronavirus. Elle a décidé de saisir les chambres disciplinaires de première instance de plaintes, ou de s'associer à une plainte en cours à l'égard de six médecins. Pour l'heure, l'objet des différentes plaintes n'est pas encore connu, mais le profil de ces six médecins permet d'en devenir la teneur.

Le professeur Didier Raoult

Il est sans aucun doute la figure la plus controversée du groupe. Didier Raoult, directeur de l'institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée à Marseille, est au coeur d'une polémique pour avoir étrillé la gestion de la crise par les autorités et les conflits d'intérêts dans la recherche internationale sur le traitement du Covid-19. Ses propos avaient poussé le conseil départemental de l'Ordre des médecins des Bouches-du-Rhône à saisir la juridiction disciplinaire, et le Cnom a choisi de s'y associer.

LIRE AUSSI : Covid-19 : comment le virus du complotisme s'est propagé chez certains médecins

Le professeur Raoult mène également des essais cliniques depuis plusieurs mois avec son équipe à Marseille sur l'hydroxychloroquine, un traitement peu coûteux et couramment utilisé contre le paludisme, et affirme qu'il est efficace. Mais de nombreux scientifiques et l'Organisation mondiale de la Santé ont critiqué les études du professeur Raoult, estimant qu'elles n'avaient pas été menées selon les protocoles scientifiques standards.

L'infectiologue Christian Perronne, ancien chef de service

A peine quelques jours après avoir été démis de ses fonctions de chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine) par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), l'infectiologue Christian Perronne se retrouve désormais dans le viseur du Conseil national de l'Ordre des médecins. L'AP-HP, qui lui attribue "des propos considérés comme indignes de la fonction qu'il exerce", notamment pour avoir affirmé que les malades du Covid représentaient une aubaine financière pour les médecins, avait également déposé plainte devant l'Ordre des médecins contre le Pr Perronne.

Dans la lignée de Didier Raoult, Christian Perronne avait également déclaré qu'une large prescription de l'hydroxychloroquine aurait permis d'éviter 25 000 morts en France. Il a de plus accusé des médecins du CHU de Nantes d'avoir "laissé crever (son) beau-frère" en refusant de lui prescrire ce traitement. En octobre, il avait par ailleurs fait polémique en dénonçant qu'"un médecin généraliste qui déclare un test Covid positif pour l'un de ses patients, (...) touche de l'argent" en plus de la consultation et en affirmant que pour les services de réanimation, ce serait le "jackpot" de garder "longtemps" des patients Covid.

Le Pr Henri Joyeux, cancérologue à la retraite

Henri Joyeux est l'un des visages de la défiance envers les vaccins et peut-être le plus connu. En 2014 et 2015, il publie sur internet des pétitions anti-vaccin. Ce cancérologue à la retraite organise également des conférences : en 2017, il dénonce "la dictature vaccinale". Il entretient une relation tumultueuse avec le Conseil national de l'Ordre des médecins. Le 8 juillet 2016, il en est radié en première instance par la chambre disciplinaire du Languedoc-Roussillon pour avoir tenu des propos "sur aucune preuve scientifique", "alignant des contre-vérités" et "dangereux pour la population parce qu'il s'agirait de discréditer le mécanisme de vaccination préventive".

LIRE AUSSI : Covid-19 : Jean-Dominique Michel, un expert autoproclamé en guerre contre la science

Il avait en effet lancé une pétition pour contester le bienfait des vaccins pour les nourrissons, rappelleLe Figaro. Il sera finalement réintégré, après une décision en appel rendue par la chambre disciplinaire Conseil national de l'ordre des médecins, organe indépendant du Cnom, jugeant la radiation "pas suffisamment motivée". L'annulation de la radiation sera finalement annulée en 2019 par la Cour de cassation, saisie par le Cnom.

Le Dr Nicole Delépine, ancienne oncologue pédiatrique

Avec son mari Gérard, Nicole Delépine a été l'une des premières voix "médicale" à s'élever contre les mesures prises pour lutter contre l'épidémie de coronavirus en France. Cette ancienne oncologue pédiatrique, devenue une figure anti-masque avec son mari, ancien chirurgien orthopédique, a multiplié les vidéos sur les réseaux sociaux et les tribunes.

LIRE AUSSI : QAnon Karen, Maxime Nicolle... Voyage au coeur de la galaxie des anti-masques

Selon eux, le confinement n'a eu aucune utilité et le port du masque ne sert à rien, précisel'Obs. Comme Didier Raoult et Christian Perronne, ils défendent l'hydroxychloroquine comme "le seul traitement valable contre le Covid-19". Enfin, ils estimaient qu'il n'y aurait jamais de deuxième vague. Le 17 septembre dernier, sur LCI, Nicole Delépine contestait l'efficacité du test PCR. "Si c'est le corona d'il y a trois ans, ça va faire positif aussi, si c'est la grippe ça va faire positif aussi", lançait-elle.

Le Dr Nicolas Zeller, médecin généraliste

Pour le docteur Nicolas Zeller, médecin généraliste à Saint-Cyr-sur-Mer dans le Var, il n'était pas question de parler d'hydroxychloroquine, mais avec de l'azithromycine. Cet antibiotique est habituellement utilisé comme traitement contre des infections des voies respiratoires. Durant la première vague, Nicolas Zeller affirme avoir traité 200 patients avec de l'azithromycine.

"Ce qui est sûr c'est que cette molécule, elle a marché et heureusement qu'on l'avait ! Ce qui était très compliqué c'était de maintenir les patients peu symptomatiques et asymptomatiques pour éviter de saturer les hôpitaux. Et on ne voulait que le système hospitalier craque... on a mis en place ce traitement et ça fonctionnait", a-t-il affirmé auprès de France 3. Deux études récentes ont pourtant montré que cet antibiotique n'était pas efficace contre le Covid-19 et qu'elle provoquait même des effets secondaires, souligne Futura Sciences. "Dans l'infection par le SARS-CoV-2, la littérature n'apporte pas d'argument pour proposer la prescription d'azithromycine", avait estimé la Direction générale de la santé dans un avis rendu le 9 juin 2020.

Le Dr Hélène Rezeau-Frantz, médecin généralité

Comme Nicolas Zeller, le Dr Hélène Rezeau-Frantz, médecin généraliste dans le Loiret, a décidé de suivre son propre protocole pour soigner ses patients contre le Covid-19. Elle a prescrit un antihistaminique à 18 personnes symptomatiques. "L'histamine étant un des maillons de la chaîne inflammatoire, le premier même, on s'est dit qu'en arrêtant ça au départ ou au moins en limitant les effets, on avait des chances de ne pas passer à des formes graves", expliquait-elle à France à franceinfo.

Elle affirme que les patients traités ont présenté des signes d'amélioration quelques heures après avoir reçu l'antihistaminique. "À mon niveau, en tant que médecin généraliste connaissant mes patients, je ne vois pas pourquoi je n'utiliserais pas quelque chose qui peut améliorer leur état, qui ne va pas leur donner d'effets secondaires graves et qui ne va pas compliquer les choses", avait-elle ajouté.

Publicité