Jeudi 25 juin au matin, de nombreux blocages routiers étaient mis en place en France par des chauffeurs de taxi. A l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, l’accès à trois terminaux était bloqué peu après 6 heures, tandis que le périphérique parisien a dû être fermé momentanément dans les deux sens vers 7 heures dans sa partie ouest.
Plusieurs syndicats de taxis avaient appelé à une journée de grève, avec des rassemblements fixes à des points clés à Paris comme dans de grandes villes de province. Ils protestent contre UberPop, le service de transport assuré par des particuliers avec leur véhicule de tous les jours. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur, a répété mercredi 24 juin à l’Assemblée nationale que ce service proposé par la société américaine Uber est en « situation d’illégalité absolue », mais il continue de prospérer et a récemment été étendu à de nouvelles villes.
Cette impuissance de l’Etat attise la colère des taxis, qui voient dans UberPop une concurrence déloyale faite par des non-professionnels, soumis à aucune charge. De fait, il n’est même pas sûr que la loi Thévenoud, votée à l’automne 2014, soit applicable pour interdire UberPop. La Cour de cassation a transmis mardi 23 juin au Conseil constitutionnel une question sur la conformité à la Loi fondamentale de l’article réprimant pénalement cette activité. Dans sa précipitation, le législateur semble avoir mal distingué le covoiturage du type BlaBlaCar des activités de taxi clandestin.
Les taxis perdent du terrain
Les taxis sont aussi vent debout contre le développement des véhicules de tourisme avec chauffeurs (VTC). Même si la loi Thévenoud a réglementé leur activité, en leur interdisant par exemple la maraude électronique ou en les obligeant à retourner vers leur point d’attache, les entreprises de VTC continuent à pousser leurs pions sur le marché français. Aux côtés d’Uber, une bonne dizaine de sociétés se déploient aujourd’hui face aux taxis.
D’AlloCab à SnapCar en passant par Green Tomato Cars, CabDriver, LeCab, Chauffeur-privé, Marcel, ou Cinq-S, c’est la folle expansion avant une inéluctable consolidation. Mais, pour l’instant, il est très difficile d’obtenir des chiffres d’affaires étayés. D’ailleurs, six ans après l’ouverture du marché du transport de personnes, il est encore extrêmement difficile de tirer un bilan de cette libéralisation.
Les taxis, profession très réglementée, perdent du terrain face à cette nouvelle concurrence, légale ou non. « Depuis deux ou trois ans, notre chiffre d’affaires baisse de 15 % par an », assure Didier Hogrel, président de la Fédération nationale du taxi. La baisse aurait été de 30 % rien que cette année. Selon les Taxis Bleus, une centrale de réservation traditionnelle, la prise en charge dans les rues aurait chuté de 20 %, et le volume des courses précommandées de 5 %. « Le prix des licences de taxi est, lui, en chute libre, passant à Paris d’un plus haut à 245 000 euros, contre un prix moyen actuel autour de 190 000 euros », assure Yann Ricordel, le directeur général de Taxis Bleus.
Un secteur de 3 milliards d’euros
Personne ne sait quantifier ne serait-ce que le nombre d’acteurs et de chauffeurs sur le marché. Les derniers chiffres de l’Insee datent de 2011.
Selon les sources, il y aurait de 2 000 à 6 500 chauffeurs indépendants travaillant pour les sociétés de VTC, à côté des 17 700 taxis recensés en Ile-de-France. Certains évoquent le nombre de 10 000 conducteurs en incluant des chauffeurs d’UberPop. Quant au volume d’affaires du secteur, tous acteurs confondus, il serait autour de 3 milliards d’euros, juge un observateur. Les seuls VTC représenteraient de 50 à 100 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Seule certitude, selon l’Insee, le chiffre d’affaires de l’ensemble de ce secteur, taxis et VTC confondus, a augmenté de 10 % entre 2010 et 2015. La croissance du marché est du côté VTC. D’ailleurs, les sociétés de VTC ne peinent pas aujourd’hui à trouver des capitaux pour financer leur développement. A l’inverse, « les banques demandent davantage de garanties pour prêter pour l’achat d’une licence de taxi », constate Didier Hogrel.
Voir les contributions
Réutiliser ce contenu