Electricité : serons-nous dans le noir cet hiver?

© Reuters

Depuis quelques mois, on craint que le pays ne doive subir quelques heures sans électricité. Une crainte renforcée par la dernière étude d’Elia, le gestionnaire du réseau électrique qui prévoit de 49 à 116 heures sans courant.

Selon Elia, il existe un risque que nous nous retrouvions sans courant pendant 49 heures cet hiver. Et si nous rencontrons, comme tous les 20 ans, un froid extrême, le “black-out” pourrait s’étendre à 116 heures. Au plus fort de l’hiver, le pays consomme en effet près de 13.500 MW (mégawatts). Or, il ne peut plus aujourd’hui en produire que 10.746.

On connaît les causes du problème. D’abord les fissures détectées dans les cuves de deux réacteurs (Doel 3 et Tihange 2) ; puis le sabotage, sur lequel le parquet enquête toujours, de la turbine de Doel 4.

Alors, serons-nous dans le noir cet hiver ? Pas sûr. “Ces 49 heures de pénurie signifient 49 heures potentiellement difficiles, pas 49 heures sans aucun mégawatts, assure la secrétaire d’Etat à l’énergie Catherine Fonck dans un entretien à L’Echo. Nous n’aurons peut-être aucune heure de délestage, parce que l’étude d’Elia n’intègre pas tout le travail que nous sommes en train de réaliser”, ajoute-t-elle.

On planche en effet depuis des mois pour remédier au problème : d’une part en essayant de réduire la consommation (en sensibilisant la population et en espérant que les fournisseurs modulent leur offre en fonction des tarifs qui ne manqueront pas d’exploser aux heures de pointe). En restreignant la consommation publique (éclairage sur les autoroutes, dans les bâtiments administratifs, etc…). En s’approvisionnant à l’étranger. Et en mobilisant la réserve stratégique de 850 MW (mégawatts).

En outre, il se pourrait que Doel 4 soit de nouveau en état de marche à la fin de cette année. Ce qui serait précieux : les pics de consommation se situent plutôt en janvier et février.

Les groupes électrogènes, la solution ?

Depuis l’annonce d’un risque de pénurie d’électricité cet hiver, l’intérêt de la population belge pour les groupes électrogènes augmente significativement, observent plusieurs vendeurs.

Energence, une société brabançonne spécialisée dans le domaine de l’énergie, a de son côté déjà reçu 20 demandes de devis en une semaine pour des systèmes de back-up à raccorder à son installation domestique. En vue d’anticiper le risque de black-out, cette société basée à Lasnes a mis au point plusieurs systèmes de back-up personnels qu’elle commercialise depuis à peine une semaine. “Nous avons déjà reçu 20 demandes de devis, surtout du secteur horeca, de PME, mais aussi de pharmacies ou encore d’une pompe à essence”, relate Michaël Willemaers, le directeur commercial d’Energence. Les grosses sociétés, elles, disposent généralement déjà de technologies de secours, ajoute-t-il.

Depuis un simple système de batteries jusqu’à l’installation d’une mini-centrale électrique et thermique fonctionnant au gaz ou au mazout, les solutions proposées par l’entreprise belge se raccordent au réseau domestique. “Les gens oublient qu’en cas de panne, ils seront privés d’électricité, mais aussi de chauffage ou de système de réfrigération”, explique le porte-parole, qui ne se connaît pas de concurrent direct. Il faut compter entre 3.000 et 4.000 euros installation et agrégation comprise pour des batteries offrant une autonomie de deux à quatre heures selon l’usage.

Même son de cloche à Liège, où le magasin d’outillage La Maison du Moteur affirme que les demandes de renseignement pour des groupes électrogènes ont plus que doublé ces derniers jours.

Bruxelles n’est pas épargné par la peur du black-out ; “Beaucoup de gens se renseignent sur les groupes électrogènes, entre 25 et 30% en plus que d’habitude”, constate également le gérant du concessionnaire Honda Van den Borre à Anderlecht. “Les gens ont peur; ils veulent se prémunir contre une panne.”

“Nous n’avons pas de position par rapport à ce phénomène, mais il ne nous étonne pas. Le risque de pénurie est réel”, a réagi Axelle Pollet, la porte-parole d’Elia. “Nous serons structurellement dépendants de nos importations cet hiver. Le rôle d’Elia est d’informer, prévenir. Nous ne pouvons pas jouer nous-mêmes sur la production”, a-t-elle conclu.

Pour éviter les coupures d’électricité, le fournisseur d’énergie Lampiris a décidé pour sa part d’offrir un service d’alerte par SMS aux citoyens, clients ou non, qui le demandent sur son site internet. Une fois inscrits, “vous recevrez un avertissement lors d’une menace de pénurie et pourrez réduire votre consommation aux bons moments”, annonce l’opérateur. Une manière qui en vaut une autre de se constituer rapidement une importante base de données d’adresse e-mail.

Du pain béni pour les assureurs ?

Il ressort d’un sondage auprès de 700 entrepreneurs de l’Unizo, l’organisation flamande des petits indépendants, que les entreprises ont encore du pain sur la planche pour s’assurer en cas de coupure de courant.

Environ 80% d’entre eux ne sont en effet pas assurés en cas de dommages résultant de coupures de courant.

Selon le directeur de l’Unizo Karel Van Eetvelt, ces résultats démontrent qu’il est urgent que la clarté soit faite sur le plan de délestage en cas de pénurie d’électricité, et ce, afin que les entreprises connaissent le risque qu’elles ont de se retrouver sans courant.

Plus de la moitié des entrepreneurs sondés (près de 54%) ont indiqué qu’une telle coupure aurait des conséquences très négatives et qu’elle obligerait l’entreprise à cesser une grande partie de ses activités.

Près d’un tiers des entreprises interrogées ont en revanche fait savoir que les désavantages resteraient limités tant que l’interruption du courant ne dure pas trop longtemps et qu’elles ont été averties “à temps”, soit au moins deux jours avant pour près de 60% d’entre eux et trois jours pour le tiers restant.

Pierre-Henri Thomas avec Belga

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