Du Petit âge glaciaire à nos jours                         Glaciations, ères glaciaires

 
Le Petit âge glaciaire


Octobre 2010. Archives communales de Chamoniix.

Le Petit âge glaciaire (Pag) s'est produit de 1550 à 1850 environ.

Le petit âge glaciaire très ressenti en Europe, et très visible dans les Alpes,
est un bon marqueur des fluctuations en "à coups" du climat.
Datations :

La datation de l’Optimum médiéval et du Petit âge glaciaire dépend d’une certaine manière de ce que l’on considère comme « chaud » et « froid » par rapport aux températures actuelles.
La datation suivante donne cette approximation :

1. Optimum climatique médiéval : 700-1300.
2. Période fraîche (« minimum de Sporer ») : 1300-1500.
3. Court réchauffement climatique : 1500-1560.
4. Petit âge glaciaire (« minimum de Maunder ») : 1560-1830.
5. Courte période plus chaude : 1830-1870.
6. Courte période fraîche : 1870-1910.
7. Période chaude du XXe siècle : 1910-2000.


18O étant un indicateur de la température et l'excès en Deuterium un traceur des conditions climatiques de la zone source des précipitations,les variations climatiques enregistrées dans un névé du Groendland lors du 17ème et 18ème siècles indiquent une baisse de température qui pourraient correspondre au Petit Age Glaciaire bien enregistré en Europe (G. Hoffman, com.pers.).




Article historique du PAG, de Serge "notre monsieur météo",

Le Pag dans toute sa splendeur...

Le petit âge glaciaire ou PAG parle essentiellement du phénomène glaciologique. Ce n’est qu’ensuite que l’on peut en tirer des conclusions de température. En tout état de cause, ce qui semble acquis, c’est que les fluctuations interséculaires du PAG ne dépassent guère le degré Celsius par rapport au petit optimum médiéval ou POM. C’est donc une connotation purement glaciaire qui définit notre PAG.

Je cite Emmanuel Leroy Ladurie dans son « abrégé d’histoire du climat du moyen-âge à nos jours » :

« Le PAG est donc un phénomène glaciaire qui ne permet que des inductions en ce qui concerne les températures, d’autant que la plus ou moins grande abondance de neige hivernale joue aussi un rôle essentiel. En tout état de cause, les fluctuations interséculaires caractéristiques du PAG, surtout par comparaison avec le tiède POM alpin qui l’a précédé, ne paraissent guère dépasser « au pire » 1° C en moins ; le réchauffement, à partir du XXème siècle terminal et surtout du XXIème, ira vraisemblablement plus loin, jusqu’à 2 à 3° C, voir davantage ».   Fin de citation.

Voila en gros l’étalement approximatif de cette période du PAG dont les débuts sont à considérer depuis 1303, jusqu’en 1860.

Année 1303 : Début du PAG
1303 à 1380, premier maximum glaciaire : de 1340 à 1370 une vague d’étés frais ; il y a un gros surdimensionnement des glaciers.
On note de 1314 à 1316 un système dépressionnaire important du au fait du rail atlantique. Ce rail qui nous fait tellement défaut actuellement, et qui par la, occasionne le manque d’alimentation neigeux indispensable pour nos glaciers. On peut globalement considérer la période 1303 à 1380 comme fraiche. Après 1380, on note un léger recul glaciaire.

Le XVème siècle nous amène aux années 1415 à 1435 ou l’on voit de belles périodes estivales. L’année 1420 est chaude de février à août ou tous les mois furent d’au moins 2° C plus chauds que les moyennes fraiches ou tièdes du XIXème ou XXème siècle. 1473 connaît un été chaud et sec, alors qu’en 1481 les saisons sont froides et pourries.

Le XVIème siècle débute, et ce jusqu’en 1560 dans une douceur du climat. En 1540, on note un recul glaciaire jusqu’en 1570 (recul modéré toutefois).
Dès 1570 une nouvelle poussée glaciaire s’observe. Les étés sont frais de 1560à 1601. D’ailleurs après 1560, et encore plus après 1570, on retrouve des étés dépressionnaires et des hivers très neigeux. La poussée glaciaire culmine en 1590, moment ou la mer de glace est visible depuis Chamonix. Ce qui n’empêche pas l’été 1590 d’être chaud.

Nous nous retrouvons maintenant à cheval sur le XVIème et XVIIème siècle.
Une avancée glaciaire est remarquée de 1580 à 1610. Une pointe glaciaire est d’ailleurs définie entre 1595 et 1640/1650.
Le terme d’hyper PAG est employé pour cette période.
Entre 1581 et 1600, le glacier d’Aletsch avance de 28 mètres par an. De 1600 à 1678 son avance est encore de 13 mètres par an.
La décennie de 1590 est tributaire d’un volcanisme important. Celle de 1620 est très froide.

Le XVIIème siècle sera celui du retour au PAG simple, par opposition à l’Hyper PAG d’avant. Puisque dès 1640, on note un léger recul des glaciers.
Remarquons encore de grands hivers : 1599/1600 et 1600/1601.

Le XVIIIème siècle, et plus précisément en 1720 une nouvelle poussée glaciaire qui se poursuivra après 1740 puis encore après 1770.
Hiver glacial 1739/1740 et 1740 connaît des saisons fraiches et pourries.

Le XIXème siècle connaitra à nouveau ce que l’on nomme un hyper PAG, puisque la phase importante de 1812 à 1817 débouche sur l’hyper PAG de 1815 à 1860 qui connaît des hivers très neigeux.

1860 est la date butoir qui détermine la fin du PAG ; c’est la débâcle alpine.

Effet sur les populations des vallées Alpines.

Après la période de recul des glaciers du moyen àge, on va assister à une nouvelle phase de refroidissement plus connue sous le terme de " Petit Age de Glace ".
Celui-ci correspond à une période allant de 1550 à environ 1850.
Les populations redescendent dans les vallées.
Du bas, ils contemplent ces montagnes et ces glaciers d'un air plutôt effrayé.
Ainsi on retrouve de nombreuses légendes qui révèlent la peur de ces populations face à ces géants recouverts d'une couche éclatante de blancheur.

En effet, les habitants des vallées étaient effrayés par les désastres que causaient la glace mais surtout la neige (avalanches).
Les sommets eux aussi faisaient peur ; en effet, ils avaient des appellations symptomatiques comme Mont Maudit.

Le Mont-Blanc possédait également des qualificatifs de ce genre.
Il en reste aujourd'hui une trace avec le sommet actuel du Mont Maudit (4465 m) montrant l'invasion brutale des glaciers au fond de la vallée.


Nos aîeux de Chamonix se souviennent du moment où les glaciers étaient beaucoup plus petits que maintenant, et se souviennent du temps où l'on pouvait aller de la vallée de glace ( la mer de glace ) à des endroits derrière les montagnes par des passages ( col du Géant ) qui sont maintenant barrés par des collines de neige, lesquelles n'ont pas plus de cinquante ans . ( J. Moore. 1779 ).
Quelques décénnies plus tard, la crue fût si forte et rapide que la mer de glace regagnait tout le terrain perdu, et débordait sur les Mottets en direction du village des bois.

Archives communales de Chamonix.

Extraits d'un long document relatant les événements survenue pendant le PAG.
De nombreux chapitres étant en ancien Français, j'ai sélectionné seulement les commentaires récents y attenant.

L'interprétation de ce texte nous fait apparaître la vallée de Chamonix à la fin du 16ème siècle sous un jour peu favorable.
Tout d'abord, les glaciers descendent très bas, puisqu'ils atteignent presque la plaine; c'est au moins le cas pour trois d'entre eux, vraisemblablement ceux d'Argentière, des Bois (mer de Glace) et des Bossons, celui de Taconnaz, moins bien alimenté, n'ayant jamais dû gagner aussi bas que ses voisins, et celui du Tour étant fort à l'écart.
Les brèches par lesquelles débouchent ces glaciers vomissent de temps à autre des déjections qui encombrent tant les couloirs par où elles dégringolent que le fond de la vallée; de pareils apports, descendant des vallées occupées par les glaciers et qui gonflent l'Arve en un véritable fleuve, nous paraissent devoir être considérés comme des débâcles glaciaires bien plutôt que comme ces avalanches ordinaires dont il est précisément question à la fin du texte.
Et en effet, la présence de débâcles qu'on nous donne comme fréquentes s'accorde bien avec l'hypothèse d'une crue glaciaire, que les textes suivants vont présenter comme particulièrement accentuée au début du 17ème siècle.
En face, c'est- à-dire du côté des Aiguilles-Rouges, ce sont des avalanches qui font rage, et avec une telle violence qu'elles traversent la vallée,emportant les arbres plantés au pied du versant opposé. Le déboisement semble plus accusé qu'aujourd'hui, puisqu'on ne mentionne d'arbres que dans le fond de la vallée, et puisque l'avalanche est devenue un phénomène assez régulier pour que les formes d'habitations s'y soient déjà adaptées. Le fait que ces pénibles conditions d'existence nous soient attestées par un arbitre, et non par un homme de la vallée, intéressé à en exagérer les défauts, rend plus précieuse cette description, d'ailleurs amplement corroborée par les textes suivants.

Les méfaits des glaciers, dus à une poussée en avant des appareils, sont cette fois formellement attestés. On peut discuter sur le sens des termes par lesquels s'expriment les désastres des hameaux du Châtelard et des Bois, et la ruine des terroirs ou des maisons paraît être le fait des eaux plutôt que des glaces; mais l'enquête établit la marche inexorable du glacier d'Argentière, qui a enseveli sept maisons des hameaux de la Rosière et Argentière. Il est donc vraisemblable que ce sont des débâcles dues à la poussée qui ont presque fait disparaître le hameau du Châtelard, maisons et champs, lequel ne va pas tarder d'ailleurs à être entièrement supprimé; quant au village des Bois, il est fortement menacé, tant par les eaux que par l'approche du glacier. Ainsi se confirme, en 1605, la tendance à la crue que les termes de l'enquête de 1580 faisaient déjà prévoir. Et le procès-verbal ajoute que les progrès de la masse glaciaire (d'Argentière) se poursuivent d'un jour à l'autre.

Cependant cette crue glaciaire de la fin du 16ème siècle et des premières années du 17ème paraît subir un arrêt. Les deux textes de 1610 et de 1616, qui suivent, ne font plus allusion qu'aux ravages des eaux. L'un et l'autre sont des procès-verbaux, de visites ou d'interrogatoires tendant à prouver les transformations que les désastres ont infligées à la vallée.

Cette fois, ce sont les débâcles qui sont responsables de tous les maux subis par les pauvres villages de la vallée. Les termes gagnent en précision pour les désigner : c'est le glacier des Bois qui « débonde » les eaux qu'il avait tenues accumulées, et celui d'Argentière qui lâche celles qu'il resserre.
Grands ravages d'ailleurs : villages détruits, qui ne reparaîtront plus, comme le Châtelard et Bonnenuit, sous le glacier des Bois; torrents qui se déplacent, à grand dommage pour les riverains, sur leurs cônes de déjections, à la suite des débâcles; terres cultivables, prés, bois, peu à peu recouverts par les « laves ». Le témoignage du marchand de Saint-Gervais, qui fréquente la vallée depuis 1580 environ, est précieux par l'indication qu'il donne de la rapidité des changements survenus, rapidité qui est le meilleur signe dé l'activité des glaciers pendant cette période. En revanche, il n'est plus question du progrès des masses de glace.' La confrontation de ces textes et de ceux qui suivent va même nous permettre de déterminer qu'il y a eu vraisemblablement un léger recul, une pulsation négative, suivie vers 1640 d'une nouvelle poussée, plus violente peut-être encore que la première.

Donc, en 1643 et dans les deux années qui précèdent, quatre glaciers au moins de la vallée se sont avancés au milieu des terres cultivées et des villages, avec une allure assez rapide pour pouvoir être appréciée au cours d'une même saison. Le glacier des Bois a gagné en 1641 et 1642 la valeur d'une portée de mousquet; en 1643, il a déjà envahi une étendue aussi considérable. Celui du Tour, dont il n'avait pas encore été question, menace le village du même nom ; le glacier d'Argentière s'avance, précédé d'une avant-garde d'avalanches; aux Bossons, le pro* grès est attesté par l'écroulement du front du glacier. Or tout cela est nouveau, comme l'atteste la précision dans la mesure des progrès des glaciers, où il n'est question que des années qui précèdent immédiatement 1643. Même il faut bien croire qu'il y a eu, entre 1610 et 1640, une période de calme et de recul, puisque le village des Bois n'est pas encore atteint par cette forte poussée, dont les progrès sont si rapides, lui qui était déjà si menacé en 1605 et 1610 que le glacier avait ruiné une partie du hameau, et que ses habitants l'avaient abandonné. Entre la crue du début du siècle et celle de 1640, nous paraît donc se placer une période de fonte et de régression, suivie d'un brusque et violent élan, et c'est vraisemblablement la violence de cette crue, succédant rapidem
ent à une accalmie, qui a désespéré les habitants un instant rassurés et leur inspire ces remèdes in extremis et ces plaintes pittoresques.

D'ailleurs, la réalité de cette crue de 1640, distincte de celle des premières années du siècle, est encore affirmée par un nouveau texte, daté de 1663, et qui nous annonce en même temps la fin de ce redoutable phénomène.

Ainsi, les textes qui nous ont été si heureusement communiqués permettent d'esquisser l'histoire d'une forte crue glaciaire, née dans la deuxième partie du 17ème siècle, et dont la courbe présente deux crans, l'un vers 1605, l'autre vers 1643, indiquant deux pulsations dont la seconde paraît avoir été particulièrement brusque et accentuée. Après quoi, les glaciers de la vallée de Chamonix semblent être passés à une période de décrue, continuée sans à coups jusque dans la deuxième partie du 18ème siècle. Ainsi se précise peu à peu le rythme de ces grands phénomènes. Leur répercussion s'est assurément fait sentir dans tous les autres grands appareils des Alpes françaises; mais nulle part elle n'est plus aisée à saisir que dans la vallée de Chamonix, parce qu'aucune autre de nos vallées ne voit les glaciers descendre ainsi jusqu'à portée des villages et des cultures, inquiétant sans cesse les hommes et les rendant attentifs à leurs redoutables caprices.


De la fin du Petit âge glaciaire à nos jours.


Le terrible Hiver 1788 / 1789

Parmi les nombreux hivers rigoureux qui jalonnent le "Petit Age Glaciaire", en voici un qui occupe une place privilégiée dans le domaine de la Climatologie, aussi bien que dans celui de l'Histoire de France.

Nombre d'historiens s'accordent à penser que l'hiver 1788-1789 a considérablement contribué à la Révolution Française de l'été suivant.

La température ressentie par l'Homme n'est pas qu'une simple affaire de thermomètre : les conditions sociales (logement, alimentation, habillement) jouent un rôle prédominant dans la lutte contre le froid.
On connaît les conditions de vie de l'époque…

Témoignages :

Extraits du livre de  L'abbé Jean Canard  (1914-1984) "Le Temps Qu'il Faisait"

Archives départementales de la Loire :

"Les grêles de juillet 1788 ayant anéanti les récoltes, l'hiver de 1789 fut doublement dur par la rigueur du froid et le manque de grains.

Le peuple, au moment des élections, était ému par le ressentiment des souffrances que lui causait la disette.

Il l'attribuait à des accaparements dont il désignait les auteurs qui appartenaient, selon lui, à la classe privilégiée

Registres paroissiaux d'Albigny :

"Dans le mois de décembre 1788, le thermomètre est descendu à 17 degrés et demi au dessous de la glace,
le froid s'est soutenu dans ce degré de rigueur pendant tout le mois.

Registres paroissiaux de Lentilly :

"La fin de l'année 1788 a été remarquable par un froid continuel et très rigoureux, depuis le 10e novembre ; la Saône et le Rhône ont été gelés ; les arbres dans la montagne ont été très endommagé par du verglas dont la pesanteur a cassé des branches qui avoient plus de six pouces de diamètre.
Le thermomètre est descendu le 31 décembre à 16 degrés 1/3 au dessous de la glace, étant exposé au nord dans la maison de La Chaux de cette paroisse.
Le blé vaut 7 francs ; il est défendu de sortir du bois, du charbon et de la farine de la ville de Lyon parce que les deux rivières qui l’approvisionnent n'ont pu fournir ni dans l'automne par défaut d'eau ni dans l'hiver par rapports aux glaces.

Les moulins d'eau ne peuvent moudre, de sorte que les pauvres ouvriers de Lyon auxquels le travail manque encore sont dans la dernière misère.
Ce jourd'hui 7 janvier 1789 le thermomètre est encore à 12 degrés au dessous de la glace.
De mémoire d'homme on ne se rappelle d'avoir eu un hiver aussi constamment rigoureux.
C'est peut-être parce que l'hiver précédent a été des plus doux et des plus courts.

Registres paroissiaux de Pouilly-le-Monial :

"Nous avons eu cette année 1788 la grêle le 13 juillet qui jointe à un petit animal que l'on peut appeler petit anneton, parce qu'il en a la forme et qui a rongé nos vignes, nous a emporté un bon tiers de la récolte du vin.
Cette même année il a fait un froid des plus longs puisqu'il a duré depuis le milieu de novembre jusqu'au 1e janvier 1789.
Il a été aussi des plus rigoureux : la Saone et le Rhône ont été passés sur la glace qui a été sur la Saone de quatorze pouces d'apaisseur.
 
Le dégèl du Rhône arrivé le 14 janvier 1789, a causé les ravages les plus affreux.
Tous les moulins, bateaux ou artifices qui étaient sur le dit Rhône ont été ou emportés ou calés à fond, ou considérablement endommagés, ainsi que le pont appelé Morand, qui éprouve quelques échèques dans ses éperons.
Le dégel sur la Saone arrivé le 17 janvier a causé les mêmes ravages ; le pont appelé de Serin a été emporté et le pont dit de Saint-Vincent a seulement éprouvé quelques dommage. 

Registres paroissiaux de Saint-André-d'Apchon :

Inhumation du 8/01/178 :
"La terre étoit gelée de 28 pouces au cimetière.

Registres paroissiaux de Saint-Clément-la-Montagne :

"L'hiver a commencé très rude depuis les environs de la Saint-Martin.

Les 23-24-25 décembre de cette année 1788 ont été remarquables par le froid rigoureux qu'on a éprouvé, puisque le thermomètre est descendu de trois degrés et de trois-quarts de plus qu'en 1709.

Tous les moulins ont été arrêtés par les glaces et on a souffert de l'hiver le plus rigoureux et le plus terrible.Le froid fut maintenu jusqu'au 1er janvier suivant, presque toujours dans le même degré et a été tel qu'on a mesuré des glaces sur la rivière de Bèbre dont quelques unes avaient 35 pouces d'épaisseur.

 Les habitants de cette paroisse ont cruellement souffert, surtout les pauvres qui manquaient cruellement de bois et ne pouvaient aller en chercher craignant de mourir de froid dans les neiges.


Registres paroissiaux de Saint-Sorlin :

"L'hiver a été des plus rigoureux qu'on ait jamais vu, il a commencé à se faire sentir le 15 novembre, la rigueur du froid a surpassé la rigueur des hivers 1709, 1765 et 1766 qui furent extrêmement froids ; beaucoup d'arbres fendus, la moitié des châtaigniers a péri et presque tous les marroniers, les vignes ont été grandement endommagés en plusieurs endroits.
Si les blés n'avaient pas été couverts de neige, ils aurait été en grand danger. Il a soufflé un vent de bise des plus véhéments et des plus froids qui a tellement introduit le froid dans les bâtiments qu'il a gelé partout, même dans les caves ; les burettes gèlent à l'église pendant la messe, on a vu aussi le vin geler dans les calices ; on a vu tomber des pluies de glaces.

Plusieurs oiseaux ont péris, on a trouvé des gelés, d'autres ayant les pattes gelées ; les rivières sont toutes gelées ; le Rhône qu'on avait jamais vu gelé l'est d'un bout à l'autre, on passe sur la glace et on le traverse ; tous les moulins sont arrêtés et la farine manque de tout côté.

Si monsieur Rey, lieutenant de police de Lyon, n'avoit pas eu la sage précaution de faire venir de la farine de Chalon, de faire à grand frais casser la glace des moulins et de faire conduire par charettes du charbon de pierre de Rive-de-Gier à Lyon, la moitié des citoyens de ladite ville serait périe de faim et de froids ; les habitants de la campagne étaient à la dernière misère, si le dégèle n'étoit pas arrivé au temps où il est venu, faute de farine.
Les glaces ont fait beaucoup de mal dans leur débâcle, des ponts emportés, des bateaux, des moulins, des bains, des plates, etc.
On évalue à plusieurs millions le mal fait en France par les glaces.
Cette année à jamais mémorable, soit par son hiver, soit par la cherté des choses, le froment vaut et a valu toute l'année 9 l, le seigle 7 l, le vin 20l l'ânée, le beurre 10 sols, le fromage 8 s, soit enfin par la Révolution.


Registres paroissiaux de Brussieu :

"L'hiver a été si long et le froid si vif, qu'aucun homme ne se rappelait d'avoir vu un tel hivers.
Le froid commença le 24 novembre 1788, fut si excessif le 31 décembre 1788, 5 et 7 janvier 1789 qu'il surpassa les hivers de 1709, de 1728, 1740 et 1766.
Le dégel arriva subitement le 13 et 14 janvier 1789.
Les rivières débordèrent et plusieurs personnes furent noyées ; on avait traversé le Rhône sur la glace, ce qui n'était pas arrivé depuis 1697.

Registres paroissiaux de Chirouble :

"Nous avons eu cette année l'hiver le plus froid et le plus rigoureux qu'on ait vu de mémoire d'hommes, même les plus âgés au point que les thermomèttres sont descendus cinq degrés au-dessous du froid de 1709.
Il a commencé le 25 novembre de cette année 1788 par des gelées si violentes que la Saône, le Rhône, la Loire toutes les rivières navigables ont été arretées et toutes les communications jusqu'au 25 janvier ; les bords de la mer même glacés.


La sécheresse commencée au mois d'octobre et qui a accompagné le froid a été cause aussi que l'on ne pouvait moudre et que le pain a manqué, même chez les boulangers, pendant une quinzaine de jours, ce qui a occasionné beaucoup de misères, comme le défaut de bois dans les villes surtout et dans les campagnes, tout le monde ayant été surpris par cet hiver précoce et vigoureux.
Beaucoup de personnes sont péries par le froid.
La débâcle des glaces qui avoient jusqu'à 18 pouces et 20 d'épaisseurs, ont entraînés des ponts sur les rivières de la Saône et de la Loire, des villages entiers submergés.


Registres paroissiaux de Charentay :

"L'hiver a été très rigoureux.
Le froid a commencé le 20 novembre 1788 et a tous les jours augmenté jusqu'au 13 janvier, à l'exception du jour de Noël que l'on crut être arrivé au dégel, et de deux autres jours où il tomba de la neige.

Le vent du nord qui domina pendant tout le temps à la suite des brouillards qui avoient tenu pendant 15 jours au moins et qui avoient occasionné une épidémie connue sous le nom de Brienne, ne permettoit presque aucune communication d'une paroisse à une autre.
Les chemins remplis de glace étoient impraticables et causèrent beaucoup d'accidents La farine devint si rare même dans les villes, que le dimanche 4 janvier,.
le lieutenant général de Villefranche et M.
le procureur du Roi firent perquisition dans les maisons de Saint-George et firent enlever, au profit de leur ville, 14 sacs de farine qu'ils payèrent et qui n'étoient pas absolument nécessaires aux propriétaires.

Rey, lieutenant général de police de Lyon, fit des prodiges en procurant du pain à cette ville et 800 bennes de charbon de terre qui arrivaient tous les jours.
Le Rhône et la Saône gelèrent dans le courant de décembre et les glaces ne partirent que le 17 janvier depuis midi et demi jusqu'à 4 heures, ce qui fut répété au départ des glaces de Mâcon le 18, 19 et 20.
Le pont de Sereins fut entièrement emporté, ainsi que tous les moulins qui étaient sur le Rhône, à l'exception de deux et plusieurs plattes, malgré toutes les précautions.
On n'a pas idée du ravage que le dégel occasionna et cet hiver a surpassé celui de 1709.
Il y eu beaucoup de malades et de morts.


Registres paroissiaux de Charentay:

"Froid horrible" pendant tout le mois de décembre.
Les premiers jours de janvier les glaces de la Saône ont entraîné un pont à Lyon

et celles de la Loire ont endommagé tous les moulins jusqu'à Roanne.

Registres paroissiaux de Chevrières :

"Il n'y a rien dans cette année de remarquable si ce n'est un froid excessif.
Il est peu d'endroit dans cette paroisse où la gelée n'ait pénétré ;
aux approches des fêtes de Noël, les puits ont glacé au point qu'on était obligé de casser la glace avec des perches.


Registres paroissiaux de Saint-Priest-la-Prugne :

"En 1789, l'hiver fut un prodige de surprise à tous les hommes qui purent se défendre ses redoutables et morteles influences tant il fut rigoureux.
Beaucoup en sont péris.
Les flux de sang, les maladies épidémiques et contagieuses devinrent général
tant dans les plaines que sur les montagnes et encore plus dans les villes".

Registres paroissiaux de Cléppé :

"Il faut observer qu'en 1789 le froid a été plus vigoureux qu'en 1709 que les blés gelèrent.
Le froid a commencé le 18 novembre 1788 et a toujours continué de plus en plus jusques au 14 janvier suivant..
La nuit la plus froide est celle du 9 au 10 janvier, on a passé la Loire sur la glace depuis le 30 décembre jusques au 14 janvier que le froid diminua.
Les glaces partirent de la Loire la nuit du 14 au 15 et firent un dégât affreux.

Elles avaient 16 à 17 pouces d'épaisseur ; il s'en arrêta au moulin Sugny environ 12 pieds d'hauteur, sur la largeur des paquiers, il s'en fit autant près du domaine de l'Isle de sorte que le chemin du port Colomb à Feurs fut clos par la glace pendant plus de 8 jours.
Ce départ de glace emporta les po
nts et planches qui estaient sur les rivières, surtout celles sur Lignon, depuis Boën jusqu'à la Celle.

Voilà ce qui nous attend au prochain refroidissement de l'Europe.

Le minimum de Maunder.

Il existe une irrégularité dans la séquence des cycles de 11 ans.

Mais le fait le plus impressionnant est la soudaine disparition des taches durant la période 1645-1715 (minimum de Maunder).
La nuit la plus froide est celle du 9 au 10 janvier, on a passé la Loire sur la glace depuis le 30 décembre jusques au 14 janvier que le froid diminua.
Les glaces partirent de la Loire la nuit du 14 au 15 et firent un dégât affreux

L'évolution temporelle de ce radio-isotope montre de plus que ce minimum n'est pas unique : il y a eu le minimum de Spörer (1420-1530), le minimum de Wolf (1280-1340) et le minimum de Oort (1010-1050).
La distance moyenne entre ces minimums est de 190 ans, mais elle n'est pas caractéristique d'une période ou quasi-période puisqu'il n'y a pas de grand minimum en 1880 (Ruzmaikin 1981).
La distance moyenne entre ces minimums est de 190 ans, mais elle n'est pas caractéristique d'une période ou quasi-période puisqu'il n'y a pas de grand minimum en 1880 (Ruzmaikin 1981).

Selon les séries d'indices terrestres de l'activité solaire, les cycles solaires de période de 11 ans survivent durant les grands minimums mais avec une faible amplitude, c'est-à-dire que peu d'évênements dus aux champs magnétiques forts apparaissent à la surface.

Des aurores boréales ont été observées durant le minimum de Maunder ce qui aurait tendance à montrer que l'activité magnétique était toujours présente bien que faible...

La disparition des taches sur le Soleil fut un phénomène remarquable et remarqué par les scientifiques de l'époque.
Il est en effet bien établi à présent que l'absence de taches n'est pas due à une absence d'observation puisqu'on compte plus de 8000 jours d'observations sur la période de 70 ans du minimum de Maunder (Hoyt et al. 1994, Ribes et al.1988a).

Weiss et Weiss (1979) notent de plus qu'il semblerait que même les non-astronomes aient été au courant de cette disparition des taches puisque Marwell dans un poème satirique adressé au roi y fait allusion.


Les Vikings à 1 200 km du pôle Nord.

Notre ère a connu entre 1450 et 1850 une période durant laquelle les hivers furent longs et rigoureux.

Cette période de quelques siècles est le petit âge glaciaire.

Auparavant, au 13ème siècle, le climat était relativement doux, si l'on songe que les Vikings ont pu coloniser la côte méridionale du Groenland, voire atteindre la terre d'Ellesmere, dans le Grand Nord canadien, située à moins de 1200 km du Pôle Nord.

L'abaissement des températures et l'extension des glaces provoquèrent l'abandon de ces terres situées sous des latitudes élevées.

Elle correspond aussi à une extension de la banquise Arctique (sur la Terre de Baffin ) et à une avancée des glaciers en montagne.

Auparavant, l'Europe du Nord, le Canada et, semble-t-il, l'Asie orientale ont connu un épisode chaud entre 900 et 1000 : c'est l'époque de la conquête du Groenland (le «pays vert », où les Vikings cultivèrent des céréales ).

Mont-Blanc 1892 / 2001.

Il est interessant de constater qu'aux plus hautes altitudes,
l'épaisseur de glace de la fin du petit âge glaciaire est très proche de l'épaisseur actuelle, seules les langues terminales présentent de très grosses différences.


1892                                                                         2001
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Phénomène mondial.

On voit bien les moraines du "Pag" et l'actuel glacier au fond à l'ombre.
Moraines PAG du Glacier Sud du Charquini (Cordillère Royale, Bolivie, 16°S)


La Mer de glace à la fin du petit âge glaciaire.




Le recul des glaciers alpins depuis 150 ans :

D'abord un manque de neige, ensuite des étés plus chauds (24 mai 2005).
Fluctuations de longueur du glacier des Bossons (en haut) et températures estivales observées dans le massif alpin depuis 1760, relativement à la moyenne du 20ème siècle (en bas).
 Le recul généralisé des glaciers alpins, depuis 150 ans, serait dû à une diminution de plus de 25% des chutes hivernales de neige, selon des glaciologues du Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l'Environnement (CNRS- Université Joseph Fourier, Grenoble) et de l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (ETHZ).


Cette analyse résout le paradoxe du recul des glaciers, survenu à une époque où les températures estivales restaient stables.
L'augmentation des températures n'a affecté les glaciers alpins qu'à partir du début du 20ème siècle et surtout depuis la décennie 1980.

Les glaciers alpins ont connu une période de forte extension au cours du «Petit Age de Glace» entre les années 1550 et  1850.
 La Mer de Glace s'étendait 1,8 km plus en aval et atteignait le village des Bois dans la vallée de Chamonix ; le glacier d'Argentière, avec 1,4 km supplémentaires, venait mourir au pied du village d'Argentière.


Le paroxysme de l'épisode de progression des glaciers alpins s'est produit entre les années 1760 et 1830.
 Or, cette dernière phase d'extension du Petit Age de Glace est en complète contradiction avec l'évolution des températures : sur la même période, les températures d'été étaient supérieures à la moyenne de celles du 20ème siècle, ce qui aurait dû conduire à un recul et une perte de volume des glaciers.

Les glaciologues montrent que cette avancée de 1760 à 1830 est en réalité survenue suite à une augmentation des précipitations hivernales (supérieures d'au moins 25% par rapport à la moyenne du 20ème siècle).
Le phénomène inverse s'est ensuite produit à partir des années 1830-1850 : le recul des glaciers alpins a résulté d'une diminution des précipitations hivernales d'au moins 25%, et non pas d'un réchauffement.


En effet les températures d'été demeuraient stables et plus froides que durant les décennies précédentes.
L'effet du réchauffement estival ne devient visible qu'à partir du début du 20ème siècle.
Depuis, les fluctuations des glaciers alpins sont principalement liées à l'évolution des températures d'été dans les Alpes.

Pour parvenir à ces conclusions, les glaciologues ont d'abord déterminé les variations de volume de quelques glaciers français, suisses et autrichiens au cours des deux derniers siècles.
De vieilles cartes indiquent les extensions des glaciers dans le passé.

Pour les compléter, les chercheurs ont utilisé un modèle d'écoulement de la glace, contraint par les positions maximales des moraines, obtenues grâce à des relevés de terrain et des photos aériennes.
Ensuite, ces variations de volume ont été simulées à l'aide des températures observées depuis 1760 et de différents scénarios de
précipitations.

Malgré tout ce que l'on nous dit : "jamais fait si chaud"...
Nous sommes à des températures à mi chemin entre les optimum récents et le petit äge glaciaire.



Il y a bien eu plusieurs "Petits âges glaciaires" (PAG), ces 4000 dernières années.

E Leroy Ladurie montre que les poussées glaciaires ont répondu (avec le décalage propre à leur temps de réponse), non pas à un refroidissement moyen mais continu, ni à des hivers très froids (qui n'ont pas d'influence sur les glaciers), mais à des séries de printemps, d'étés en particulier, et d'automnes frais. Leur équilibre, très sensible a ainsi été rompu.

l'historien note bien de vraies séries allant jusqu'à 10 à 20 ans, et non d'une tendance permanente, ni d'alternances rapides de changements de ces étés.
Et cela s'est produit un certain nombre de fois de 1550 environ, à 1850 environ.

C'est cela qui a fait la grande crue glaciaire du PAG avec des poussées fortes assorties de maximum à l'issue de chacune de ces séries d'étés frais.
Donc ces étés au cours desquels l'ablation a été moindre ont bouleversé l'équilibre glaciaire. Bien sur que parallèlement il neigeait plus bas et beaucoup, ce qui alimentait fortement les bassins d'accumulation.

Maximum glaciaires en 1601, en 1643/1644.
Fortes poussées glaciaires en 1691/1702. 1716/1719. 1740/1751. 1770/1776.
1809/1818 (9 étés frais ont précédé l'éruption glaciaire de 1817/1822).
1836/1845.
Le temps séparant 2 fluctuations peut varier de 25 à 50 ans.

De 1560 à 1600, le nombre et l'intensité des été chauds diminue de façon radicale, il n'y a plus de grandes séries d'étés chauds.
De 1880 à 1950, l'évolution est absolument inverse.

5 PAG se sont succédés ces 4000 dernières années, avec des durées très variables, et un rythme très variable.
Le maximum des glaciers Alpins, au moins comparable au dernier, s'est produit entre 1400 et 1300 avant J.C.
2 maximums successifs de 900 à 300 avant J.C. de 2 à 3 siècles chacun, séparés par un intervalle qui ne dura pas plus d'un siècle.
Suivi l'optimum climatique Romain.
Nouveau PAG de 400 à 750 après J.C.
Puis de 1200 à 1300/1350 environ.
enfin de 1550 à 1850/1880.

Les phases de retrait, donc de périodes douces vont d'à peine plus d'un siècle, à 3 ou 4 siècles et même plus.