Réchauffement: la toundra se décompose

En se décomposant, à cause de l’augmentation de la température, la toundra va produire du gaz carbonique et donc accélérer encore le réchauffement.
Jusqu’à présent, la plupart des études prédisaient que le réchauffement de la planète ferait de la toundra une zone plus verte. Selon ce scénario, les végétaux qui l’occupent se développeraient rapidement en emmagasinant davantage de gaz carbonique. Paul Grogan, spécialiste des écosystèmes nordiques à l’université Queen’s, et ses collègues aboutissent à une conclusion opposée : ils estiment que le réchauffement va aussi favoriser la décomposition de la tourbe, de la mousse et des autres végétaux. Et que cela va augmenter d’environ 25 % la concentration de gaz carbonique dans l’atmosphère. Michelle Mack, qui a mené l’étude, a étudié des parcelles artificiellement fertilisées en Alaska. En ajoutant à leur sol de l’azote et du phosphore, elle a reproduit la qualité nutritive que produirait un réchauffement prononcé de la zone arctique. Entre 1981, début de l’expérience, et 2000, les sols qu’elle a étudiés ont subi une déperdition nette de 2 kilogrammes de carbone par mètre carré. La déperdition la plus importante s’est produite à plus de 5 centimètres sous la surface du sol. Elle était passée inaperçue jusqu’à présent parce que les mesures ne portaient que sur la couche superficielle.
A mesure que le sol se réchauffe, l’activité microbienne augmente. Les micro-organismes digèrent la matière organique et libèrent du gaz carbonique ainsi que de l’azote et du phosphore, ce qui stimule la croissance des végétaux. Cette croissance a doublé avec le réchauffement climatique : des arbustes d’une cinquantaine de centimètres remplacent désormais les carex [une graminée compacte] poussant au ras du sol. Mais la quantité de carbone émise par l’accélération de la décomposition dépasse celle absorbée par cette nouvelle couverture végétale.
Paul Grogan et Michelle Mack soulignent que leurs expériences se sont concentrées sur un seul aspect du cycle du carbone, qui se déroule de façon complexe entre l’atmosphère et la terre : l’effet d’une augmentation des éléments nutritifs présents dans le sol. Ces résultats ne s’appliquent pas forcément à d’autres régions nordiques, comme les immenses tourbières boréales ou le désert polaire. Et il faut tenir compte d’autres facteurs environnementaux, comme la fonte du permafrost et le réchauffement du sol, précisent les chercheurs. Toutefois, “ces résultats remettent en question certaines de nos suppositions. On considérait jadis que, si on avait plus de plantes et d’arbres, on stockait automatiquement du carbone, ne serait-ce que temporairement”, explique Tim Moore, un professeur de géographie à l’université McGill, qui étudie le cycle du carbone dans une tourbière située près d’Ottawa.
Peter Calamai The Toronto Star

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Source : Courier Internationnal

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