Energie solaire : les solutions de stockage commencent à trouver leur marché

Le très médiatique patron de Tesla, Elon Musk, a fait sensation en avril en présentant ses batteries ultra-design destinées aux habitations et aux entreprises. Couplées à des panneaux solaires, elles permettraient selon lui « d’alimenter la terre entière en électricité ». Seul inconvénient : elles sont vendues à un prix minimum de 3.000 dollars... Pas tout à fait encore à la portée de toutes les bourses.

Le rêve d’Elon Musk n’est toutefois pas si loin de la réalité. Dès aujourd’hui, dans certaines conditions, l’équation économique a été résolue. Le stockage, qui permet de résoudre le problème de l’intermittence de l’énergie solaire, est devenu compétitif. Pour preuve, les prix proposés dans le cadre de l’appel d’offres solaire en cours en France sur les zones non interconnectées (notamment les DOM TOM), tenus d’intégrer des solutions de stockage : selon les professionnels, ils seraient tombés à 250 euros/mégawattheure. « Cela correspond, dans ces zones isolées, au coût de production de l’électricité par des moyens conventionnels, notamment parce qu’il faut y acheminer le combustible », note Arnaud Mine, président de la branche solaire du SER (Syndicat des énergies renouvelables). Il y a quelques années, les industriels ne parvenaient pas à descendre en dessous de 400 à 450 euros.

Des batteries construites à grande échelle

C’est que les coûts des batteries ont, tout comme ceux des panneaux solaires, chuté de façon spectaculaire. Les batteries lithium-ion, notamment, sont aujourd’hui construites à grande échelle par les coréens LG et Samsung, ou encore par le français Saft. La recherche a permis de réduire leur taille et d’améliorer leurs performances, tandis que l’industrialisation a généré des économies d’échelle. «En deux ans, les prix ont été divisés par deux, et la baisse va se poursuivre », témoigne Christophe Gurtner, PDG de Forsee Power, une PME française qui développe des systèmes de stockage de l’énergie sur mesure. Le marché commence à décoller. « Entre 2010 et 2013, nous avons développé de nombreux démonstrateurs », témoigne Fred Hapiak, directeur de la business unit stockage d’énergie chez Saft. « Depuis 2013, nous sommes passés aux applications commerciales : nous comptons aujourd’hui 70 installations dans le monde, sur tous les continents ».

En Europe de l’Ouest, le stockage reste très cher comparativement aux autres énergies. Mais dans bien des zones isolées ou souffrant de réseaux électriques défaillants, c’est de plus en plus souvent la solution qui s’impose en cas de besoin de nouvelles capacités : c’est le cas en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie du Sud Est. La PME française Akuo, qui a installé un tel système à La Réunion (Bardzour), décroche désormais des contrats en Indonésie, où le gouvernement cherche à renforcer les capacités de production dans ses nombreuses îles. « Nous sommes noyés par les projets possibles, nous devons les trier ! », affirme de son côté Christophe Gurtner, chez Forsee Power.

« On est passé du stockage réservé au chalet de montagne isolé, au stockage permettant d’intégrer l’électricité solaire à des réseaux de grande taille », note Edouard Sauvage, directeur de la stratégie chez Engie. La prochaine étape, qui rendra compétitif le stockage au sein des grands réseaux interconnectés, nécessitera encore quelques efforts. Mais elle n’est plus si loin.